Par Me Félix-Antoine T. Doyon

R. c. O’Brien, 2013 CSC 2 (5 contre 4) a trait au crime de proférer des menaces que l’on retrouve à l’art. 264.1 du C.cr..

L’actus reus de l’infraction est le fait de proférer des menaces de mort ou de blessures graves. Pour décider si une personne raisonnable aurait considéré les paroles prononcées comme une menace, le tribunal doit les examiner objectivement, en tenant compte des circonstances dans lesquelles elles s’inscrivent, de la manière dont elles ont été prononcées et de la personne à qui elles étaient destinées. Le fait que la victime visée soit au courant de la menace ne constitue pas un élément essentiel de l’infraction. 

La mens rea de l’infraction est l’intention de faire en sorte que les paroles prononcées soient perçues comme une menace de causer la mort ou des blessures graves, c’est-àdire comme visant à intimider ou à être pris au sérieux (voir R. c. Clemente, [1994] 2 R.C.S. 758).

Selon nous, la Cour, dans O’Brien, vient ajouter à la jurisprudence applicable la chose suivante : la réaction de la personne concernée par la menace est pertinente relativement à l’analyse des circonstances.

Le juge Fish écrit :

[9]Contrairement à ce que prétend le ministère public, nulle part dans ses motifs la juge du procès n’a affirmé avoir acquitté l’accusé pour la seule raison que la personne ayant fait l’objet des menaces ne les avait pas prises au sérieux.

[10]Après avoir correctement exposé les principes applicables, la juge du procès a plutôt estimé, à juste titre, qu’elle était tenue [traduction] « d’envisager les mots [prononcés par M. O’Brien] à la lumière du témoignage de [la personne à qui ils étaient destinés] ».  Ce témoignage était pertinent, et donc admissible pour apprécier le contexte dans lequel les mots s’inscrivaient.

[11]Comme l’a expliqué le juge Cory dans l’arrêt Clemente, à la p. 762 :

[. . .] la question de savoir si l’accusé avait l’intention d’intimider ou si les termes qu’il a employés visaient à être pris au sérieux sera habituellement tranchée, en l’absence d’explication de la part de l’accusé, en fonction des mots utilisés, du contexte dans lequel ils s’inscrivent et de la personne à qui ils étaient destinés.

[12]Manifestement, la juge du procès s’est posé la bonne question.  Elle y a répondu en concluant que la preuve soulevait un doute raisonnable quant à savoir si M. O’Brien avait la mens rea nécessaire pour commettre l’infraction reprochée.  Et c’est pour cette raison qu’elle a prononcé son acquittement.

[13]À l’instar du ministère public, j’estime qu’il n’est pas essentiel, pour faire la preuve de l’infraction prévue à l’al. 264.1(1)a), de démontrer que la personne ayant fait l’objet des menaces proférées par l’accusé s’est sentie intimidée par ces dernières ou les a prises au sérieux.  Il suffit de prouver que l’accusé avait l’intention qu’elles produisent un tel effet.