L’article 244.2(1)a) du Code criminel vise plus généralement à protéger le public contre ceux qui utilisent les armes à feu de manière insouciante, au détriment de la protection de la vie humaine.
[25] Selon l’alinéa 244.2(1)a) du C.cr., commet une infraction quiconque « décharge intentionnellement une arme à feu en direction d’un lieu, sachant qu’il s’y trouve une personne ou sans se soucier qu’il s’y trouve ou non une personne » (« who intentionally discharges a firearm into or at a place, knowing that or being reckless as to whether another person is present in the place »).
[26] L’élément matériel de cette infraction consiste en la décharge d’une arme à feu en direction d’un lieu. Selon le paragraphe 244.2(2) du C.cr., le « lieu » s’entend notamment de « tout bâtiment ou construction – ou partie de ceux-ci » (« any building or structure — or part of one »).
[27] Quant à l’élément mental de l’infraction, la décharge de l’arme à feu doit être intentionnelle, et non pas accidentelle[6]. Le ministère public doit également prouver hors de tout doute que l’accusé savait, en déchargeant intentionnellement l’arme à feu en direction du lieu en question, qu’il s’y trouvait une personne, ou encore qu’il était insouciant quant à la présence ou non d’une personne dans ce lieu[7].
[28] L’appelant plaide que le juge erre en déterminant qu’il a déchargé son arme « en direction » de la maison, puisqu’il a tiré de l’intérieur et non pas de l’extérieur. À son avis, cette disposition vise à éradiquer les groupes criminels organisés se livrant à des fusillades de rues, ce qui n’est pas le type de comportement reproché ici.
[29] Selon moi, l’appelant a tort.
L’alinéa 244.2(1)a) du C.cr. ne requiert pas que les coups de feu soient tirés de l’extérieur, mais bien « en direction d’un lieu ».
[30] L’alinéa 244.2(1)a) du C.cr. ne requiert pas que les coups de feu soient tirés de l’extérieur, mais bien « en direction d’un lieu ». Comme indiqué, selon le paragraphe 244.2(2), un « lieu » comprend toute partie d’un bâtiment.
[31] La version anglaise de l’alinéa 244.2(1)a) du C.cr. est plus précise, indiquant que commet une infraction la personne « who intentionally discharges a firearm into [peut signifier en direction de, ou vers l’intérieur][8] or at [vers, en direction de] a place ».
[32] L’alinéa 244.2(1)a) du C.cr. vise donc les situations suivantes : 1° celui de la personne qui, de l’extérieur, tire en direction d’un bâtiment [« at »][9]; 2° celui de la personne qui, se trouvant à l’extérieur, mais près ou à portée d’un bâtiment, tire vers l’intérieur de celui-ci [« into »] (exemple, par une fenêtre ou une porte)[10]; et 3° celui de la personne qui, se trouvant à l’intérieur, décharge son arme vers l’intérieur du bâtiment [« into »][11].
[33] En somme, ce n’est pas la position géographique du tireur qui compte, mais la destination du tir – qui doit être en direction d’un lieu, qui comprend un bâtiment ou une partie de celui-ci. La partie d’un bâtiment peut consister en sa portion extérieure ou sa portion intérieure. Il peut également s’agir d’une subdivision plus précise du bâtiment, comme un étage ou une unité de copropriété.
[34] Dans tous les cas, le tireur doit savoir qu’il se trouve une personne dans le lieu, ou encore être insouciant quant à la présence ou non d’une personne.
[35] Il est vrai que le Projet de loi C-14[12], qui incorpore l’article 244.2 au C.cr., visait particulièrement à réprimer la criminalité organisée. Il reste cependant que les infractions prévues à l’article 244.2 ont une portée plus large.
[36] Dans l’arrêt Goupil c. R., notre Cour précise en effet que « l’article 244.2 C.cr. vise notamment, mais non exclusivement, les groupes criminels organisés se livrant à des fusillades qui témoignent de leur mépris pour la vie des autres »[13].
[37] En somme donc, le fait que l’accusé a tiré de l’intérieur ne le disculpe pas de l’infraction. Il a tiré en direction d’un lieu, c’est-à-dire en direction de l’intérieur d’un bâtiment. Ce type de comportement est visé par l’alinéa 244.2(1)a) du C.cr.