Il est acquis que l’objectif principal du législateur en cette matière est d’éviter que le temps et l’expertise des analystes, qui effectuent des centaines d’analyses par années, soient utilisés à mauvais escient et qu’ils soient ainsi contraints de témoigner sur les résultats consignés à leurs certificats, à moins qu’il n’existe des raisons valables de mettre en doute leur fiabilité ou leur exactitude.
[16] Finalement, l’appelant porte en appel la décision du juge Morand qui rejette sa requête pour permission de contre-interroger les analystes ayant procédé à l’analyse des substances saisies et confectionné un certificat visant à en confirmer la nature.
[17] Après avoir demandé et reçu environ 2 000 documents, dont les feuilles de travail des analystes, les documents d’application générale ainsi que les protocoles et méthodes suivis pour la confection des certificats déposés au dossier, l’appelant, s’appuyant sur le paragraphe 51(2) de la Loi, demande la permission de contre-interroger les analystes, auteurs des certificats afin d’obtenir une preuve contraire lui permettant de réfuter la présomption d’exactitude qui leur est attribuée. Il spécifie que deux des 2 000 documents ne contenaient pas les informations requises quant à l’échantillon type utilisé, ce qui l’empêchait de comprendre adéquatement le processus d’analyse et d’évaluer la valeur probante des certificats et formule une objection générale quant à la qualité d’expert des analystes.
[18] Le paragraphe 51(1) de la Loi prévoit qu’un certificat d’analyse « (…) sauf preuve contraire, fait foi de son contenu sans qu’il soit nécessaire de prouver l’authenticité de la signature ni la qualité officielle du signataire ». Un certificat d’analyse constitue une preuve prima facie de l’exactitude des résultats qui y sont indiqués.
[19] Cette présomption simple peut être renversée par présentation d’une preuve contraire suffisamment sérieuse pour soulever la possibilité d’une contradiction raisonnable ou encore qui tend à miner l’admissibilité ou la force probante des certificats[13]. Celle-ci peut aussi être relative à l’analyste lui-même, sa compétence, son intégrité ou les procédures suivies pour tirer ses conclusions[14]. La jurisprudence a déjà établi que des spéculations, hypothèses ou conjectures ne franchissaient pas ce seuil[15].
[20] Il est acquis que l’objectif principal du législateur en cette matière est d’éviter que le temps et l’expertise des analystes, qui effectuent des centaines d’analyses par années, soient utilisés à mauvais escient et qu’ils soient ainsi contraints de témoigner sur les résultats consignés à leurs certificats, à moins qu’il n’existe des raisons valables de mettre en doute leur fiabilité ou leur exactitude[16]. Il en va aussi de l’économie des ressources judiciaires. Cette façon de procéder ne met pas en cause le droit de l’accusé à une défense pleine et entière puisque le contre-interrogatoire peut être permis en certaines circonstances[17].
[21] Le paragraphe 51(2) de la Loi autorise le contre-interrogatoire de l’analyste avec la permission du tribunal et il relève du pouvoir discrétionnaire du juge de l’accorder. En l’instance, le juge Morand considère que les motifs invoqués par l’appelant sont insuffisants et que les éléments de preuve avancés sont « parcellaires et incomplets ». Il rappelle que l’appelant n’a pas produit d’expertise pour clarifier sa position et ne s’est pas prévalu de son droit de procéder à une analyse indépendante des échantillons comme le lui permet l’article 605 C.cr. Finalement, le juge Morand constate que l’appelant n’a présenté aucune preuve permettant de mettre en doute la compétence des analystes en cause.
[22] En somme, l’appelant n’a pas su convaincre le juge Morand qu’il y avait apparence d’erreur dans l’analyse des substances ou qu’il existait, à première vue, des motifs l’autorisant à exercer sa discrétion de permettre un contre-interrogatoire des analystes en raison de la fiabilité douteuse des résultats.
[23] Il serait contraire à l’intention du législateur de permettre l’interrogatoire d’un analyste dans ce contexte afin de tenter d’obtenir de la preuve sans autre fondement objectif relatif à la validité des résultats contenus dans le certificat[18]. L’appelant ne réussit pas à nous convaincre que le juge Morand n’a pas exercé sa discrétion de manière judiciaire[19].