R. c. J.L., 2018 QCCA 815

* voir aussi César-Nelson c. R., 2014 QCCA 1129, par. 70; Bérubé Pelletier c. R., 2020 QCCA 667, par. 31

L’absence d’enregistrement alors que les accusés sont interrogés en salle d’interrogatoire, le manque de fiabilité de la retranscription des propos et le caractère incomplet des notes qui prive le tribunal du contexte des déclarations sont tous des éléments importants à cet égard

[22]        À mon avis, le ministère public ne peut, lors de la mise en preuve de la déclaration extrajudiciaire d’un accusé, se contenter de produire uniquement des extraits choisis pour leur cohérence avec sa culpabilité.

[23]        La Cour a déjà eu l’occasion de souligner qu’il est souhaitable que les déclarations extrajudiciaires des accusés soient enregistrées afin d’en exposer le contexte et pour assurer leur fiabilité. L’omission de le faire ne les rend toutefois pas inadmissibles, mais le ministère public doit alors établir les circonstances garantissant que leur contenu est fiable et probant.

[24]        En l’espèce, à l’exception des admissions relatives au caractère libre et volontaire des déclarations, au respect des droits constitutionnels de l’intimé ainsi qu’à la relecture et à la signature par lui du document préparé par le policier, la preuve ne révèle rien de plus sur les circonstances de leur obtention ou sur le contexte des réponses rapportées.

[25]        De plus, contrairement à ce que prétend l’appelante, l’admission ou l’absence de contestation du caractère libre et volontaire ne permet pas d’inférer le caractère probant d’une déclaration extrajudiciaire d’un accusé :

The trial judge has a discretion to accept the waiver and dispense with the holding of a voir dire. If the trial judge accepts the waiver, the statement is admissible without a voir dire. In these circumstances, the waiver is not a acknowledgment of its evidential value, but is merely an acknowledgment of its voluntariness.[9]

[26]        Dans l’arrêt César-Nelson[10], le juge Rochon reprend avec approbation les propos de la juge Conrad de la Cour d’appel d’Alberta qui, écrivant pour la majorité dans R. c. Ferris, souligne :

[29]      McClung, J.A. suggests that because there was no deliberate editing or bad faith, it should be admissible if it is voluntary. I disagree. It is not the good faith of the police that is in issue but the meaning of the words. He further suggests that the accused could have clarified the meaning of the words by testifying or by calling his father to testify. This is not the accused’s onus. It is the onus of the Crown to adduce words capable of meaning before the defence has anything to meet. An inference cannot be used to make words an admission when the evidence clearly indicates the words were an incomplete statement and therefore meaning could not be ascertained. The Crown must make a prima facie case for admission. An inference cannot be used to fill in holes in the evidence. […][11]

[Je souligne]

[27]        Le juge Rochon ajoute, au paragraphe 82 du même arrêt, que « […] l’absence d’enregistrement alors que les accusés sont interrogés en salle d’interrogatoire, le manque de fiabilité de la retranscription des propos et le caractère incomplet des notes qui prive le tribunal du contexte des déclarations sont tous des éléments importants à cet égard »[12]. J’ajoute que de telles lacunes sont susceptibles d’avoir un effet significatif sur la fiabilité accordée aux déclarations extrajudiciaires qui en souffrent.