R. c. Maloley, 2019 QCCM 26

 

Le requérant dépose une requête en exclusion de la preuve en vertu des articles 8, 9 et 10b) de la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après : « Charte ») alléguant que le policier n’avait pas de motifs raisonnables de croire qu’il était en train de conduire avec les capacités affaiblies par l’alcool, comme le requiert les articles 495(1) et 254(3) du Code criminel afin de pouvoir procéder à son arrestation et de le sommer de fournir des échantillons d’haleine, et de ne pas avoir eu recours à l’assistance de l’avocat de son choix.

 

III.        ANALYSE ET DÉCISION

[114]     À partir de toute la preuve, le Tribunal doit décider si l’agent Brochu avait des motifs raisonnables de croire que le requérant était en train de conduire avec les capacités affaiblies par l’alcool, comme le requiert les articles 495(1) et 254(3) du Code criminel afin de pouvoir procéder à son arrestation et de le sommer de fournir des échantillons d’haleine dans un alcootest. Également, avant de le faire, si le requérant a eu une possibilité raisonnable d’avoir recours à l’assistance de l’avocat de son choix.

[115]   Advenant le cas où le Tribunal conclut par la négative, à l’une de ces deux situations, est-ce que la preuve recueillie doit nécessairement être exclue?

[116]   En somme, ce sont les questions auxquelles le Tribunal devra répondre.

  1. a)        L’article 9 de la Charte

[117]   Les articles 495(1) et 254(3) du Code criminel exigent que l’agent Brochu ait des motifs raisonnables de croire qu’une infraction soit commise, ici, celle de conduite avec les capacités affaiblies par l’alcool. À cette étape, l’agent n’a pas à être convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité du contrevenant. La norme applicable, à la fois subjective et objective, est celle de la probabilité qu’une infraction soit commise. Pour ce faire, les motifs de l’agent doivent être suffisants pour convaincre une personne raisonnable que le requérant a probablement commis l’infraction de conduite avec les capacités affaiblies par l’alcool. Le Tribunal se réfère aux arrêts R. c. Shepherd[18], R. c. Bernshaw[19] et R. v. Bush[20]. Notons que depuis 2008 les mots « et probables » ont été supprimés de l’article 254(3) du Code criminel. Cet article requiert maintenant que des « motifs raisonnables de croire ».

[118]     C’est l’ensemble des faits observés par l’agent qui permettront au Tribunal de décider si la croyance de celui-ci est raisonnable. Ainsi, le Tribunal ne doit pas morceler la preuve afin d’analyser chaque symptôme isolément. Il va de soi que le Tribunal doit également s’en tenir aux faits connus par l’agent au moment de l’arrestation. Le Tribunal se réfère aux arrêts R. c. Shepherd[21], Bouchard c. La Reine.[22] et R. v. Bush[23].

[119]   Par ailleurs, l’agent n’a pas à utiliser un ADA s’il a déjà acquis des motifs raisonnables de croire que le requérant a les capacités affaiblies par l’alcool. Le Tribunal se réfère aux arrêts Anderson c. La Reine.[24], Bouchard c. La Reine.[25], R. c. Beaudry[26], Landry c. R.[27] et R. v. Bush[28].

[120]   Toutefois, la formation et l’expérience de l’agent sont des facteurs pertinents que le Tribunal peut considérer dans l’évaluation de ses motifs. Le Tribunal se réfère aux arrêts R. v. Bush[29] et R. c. MacKenzie[30].

[121]   Les faits observés par l’agent doivent être pris dans son ensemble et être suffisants pour convaincre une personne sensée, raisonnable et bien renseignée que le requérant a probablement commis une infraction. Le Tribunal se réfère aux arrêts R. c. Lafrance[31] et Malakhanian c. La Reine[32].

[122]   Il est important de se rappeler que ce n’est pas le nombre d’observations, mais le cumul de celles-ci par l’agent qui fondera la probabilité de la commission d’une infraction relativement à la conduite d’un véhicule automobile. En effet, il s’agit souvent, comme en l’espèce, d’une enquête rapide faite sur le bord de la route concernant ces infractions, c’est-à-dire celle concernant la capacité d’une personne de conduire un véhicule après avoir consommé de l’alcool ou celle de conduite d’un véhicule après avoir consommé une quantité d’alcool telle que l’alcoolémie est supérieure à la limite légale.

[123]   Notons qu’il s’agit de deux infractions distinctes et que l’absence de preuve de symptômes habituels de capacités affaiblies comme la démarche chancelante et la bouche pâteuse n’est pas un facteur déterminant dans l’évaluation des motifs puisque le Tribunal ne connaît pas le niveau de tolérance à l’alcool du requérant. Le Tribunal se réfère à l’arrêt R. c. Boucher[33]. Chaque cas étant donc un cas d’espèce. De surcroît, l’absence de certains éléments de preuve ne peut annuler les éléments constatés par l’agent et sur lesquels il fonde ses motifs raisonnables de croire à la commission d’une infraction : voir l’arrêt Cartier c. La Reine[34].

[124]   Or, les éléments de preuve, non contredits ni expliqués, sur lesquels l’agent Brochu fonde ses motifs raisonnables pour procéder à l’arrestation du requérant sont :

  •    L’heure tardive[35];
  •    La haute vitesse à laquelle le requérant franchit l’intersection face à un feu rouge pour effectuer un virage à gauche, et ce, sans se soucier des véhicules circulant dans sa direction. Le requérant a été chanceux de ne pas être entré en collision avec les autres véhicules et sa manœuvre automobile ainsi que son accélération donnent l’impression qu’il s’esquive d’une infraction ou de quelque chose;
  •    L’odeur d’alcool qui provient de l’habitacle du véhicule;
  •    Ses yeux jaunâtres, vitreux et aussi rougis dans le blanc des yeux;
  •    Lorsque l’agent demande au requérant de sortir de son véhicule afin d’effectuer une intervention sécuritaire. Aussitôt à l’extérieur du véhicule, le requérant s’interroge sur la raison de cette demande en disant : « Pourquoi? » À ce moment-là, il sent une odeur d’alcool provenant de l’haleine du requérant;
  •    Les six années d’expérience de l’agent incluant celles comme opérateur en cinémomètre laser.

[125]   En l’espèce, la croyance sincère et honnête de l’agent Brochu quant à l’existence de motifs raisonnables d’ordonner au requérant de fournir des échantillons d’haleine ressort clairement lors de son témoignage à la cour. En effet, le Tribunal a pu constater, sans aucun doute, que les faits observés et décrits par l’agent Brochu corroborent sa croyance quant à l’existence de motifs raisonnables de croire à la commission d’une infraction[36].

[126]   Quant à la norme objective de l’analyse des motifs raisonnables en gardant en tête la nature des accusations reprochées, le Tribunal considère que l’ensemble des faits mis en preuve permet de considérer plausiblement que le requérant est un suspect aux yeux d’une personne sensée, raisonnable et bien renseignée se trouvant à la place de l’agent Brochu, croyant ainsi à l’existence de motifs raisonnables pour procéder à son arrestation.

[127]   Bien que l’ensemble de la preuve puisse susciter un doute raisonnable sur la culpabilité du requérant quant à l’affaiblissement de sa capacité de conduire un véhicule par l’effet de l’alcool, la norme exigée à l’agent Brochu au moment qu’il décide de mettre en arrestation le requérant et de lui ordonner de fournir des échantillons d’haleine est peu élevée, c’est-à-dire c’est celle de la probabilité qu’une infraction soit commise. En d’autres mots, l’agent Brochu ne doit pas être convaincu de la culpabilité de la personne arrêtée, mais plutôt de l’existence de motifs raisonnables de croire à la commission de l’infraction prévue à l’article 253 du Code criminel.

[128]   En considérant l’ensemble des circonstances du présent dossier, le Tribunal arrive à la conclusion que l’agent Brochu avait objectivement des motifs raisonnables de mettre en état d’arrestation le requérant.

[129]   Il n’y a donc pas eu de violation de l’article 9 de la Charte.

[130]   Cependant, si le Tribunal commettait une erreur en concluant ainsi, notons que le cumul de violations devrait être un élément à considérer dans l’analyse de l’exclusion de la preuve en conformité avec les principes de l’article 24(2) de la Charte.

  1. b)        L’article 10b) de la Charte

[131]   L’article 10b) de la Charte consacre le droit à toute personne détenue ou arrêtée d’avoir recours aux services d’un avocat, ce qui inclut selon la jurisprudence[37] le droit de choisir son avocat.

[132]   La jurisprudence[38] va imposer aux agents les trois obligations suivantes :

1)     Celle d’informer la personne détenue ou arrêtée de son droit de recourir sans délai à l’assistance de l’avocat de son choix et de l’informer de l’existence de l’avocat de garde et de l’existence de l’avocat de l’Aide Juridique, sans égard à ses moyens financiers;

2)     Celle de fournir à la personne détenue ou arrêtée une possibilité raisonnable d’exercer son droit et d’en faciliter l’exercice;

3)     Celle de s’abstenir d’interroger ou de soutirer des éléments de preuve de la personne détenue ou arrêtée avant qu’elle n’ait pu exercer son droit de consulter l’avocat de son choix.

[133]   En l’espèce, le Tribunal devra décider si le droit du requérant, une fois en état d’arrestation, de recourir à l’assistance d’un avocat de son choix, reconnu par la Charte, a été violé.

[134]   Notons que la personne arrêtée doit agir de façon diligente dans l’exercice de son droit de consulter l’avocat de son choix et que ce droit n’est pas absolu, c’est-à-dire elle doit dans un délai raisonnable en consulter un autre au besoin. Le Tribunal se réfère à l’arrêt Émond c. La Reine[39].

[135]   Bien entendu, la personne arrêtée peut refuser de parler à un autre avocat pendant qu’elle attend le retour d’appel de son avocat. Par contre, ce délai d’attente doit être raisonnable et dépend de l’ensemble des circonstances, comme la gravité de l’infraction et l’urgence de l’enquête.

[136]   De plus, la personne arrêtée a le droit de communiquer avec un «tiers» ou un « intermédiaire » dans le but d’obtenir l’information nécessaire afin de pouvoir exercer son droit à l’avocat de son choix. Le Tribunal se réfère aux arrêts R. c. Tremblay[40], R. v. Rowland[41], R. v. Paul[42], R. v.Hugues[43], R. c. Boucher[44].

[137]   Notons que l’agent du SPVM est celui qui communique avec l’avocat ou le tiers et non la personne arrêtée. L’agent s’assure ainsi que la personne arrêtée exerce réellement son droit. En conséquence, en faisant lui-même les démarches, l’agent doit s’assurer que la personne arrêtée a pu raisonnablement exercer son droit à l’avocat de son choix.

[138]   Rappelons que la personne arrêtée doit faire preuve de diligence raisonnable selon la situation dans laquelle elle se trouve, sinon les obligations qui sont imposées à l’agent sont suspendues. En somme, l’ensemble des circonstances (autrement dit le contexte) sera considéré dans l’analyse de l’exercice raisonnable de ce droit, comme le comportement de la personne arrêtée.

[139]   Qu’en est-il en l’espèce?

[140]     Il ne fait aucun doute que le requérant a manifesté le désir, dès la lecture de ses droits dans le véhicule de patrouille, de communiquer avec l’avocat de son choix et qu’il était conscient que l’exercice de ce droit se ferait plus tard au centre opérationnel nord. Ils arriveront au centre opérationnel nord à 1 h 39.

[141]   Au moment de l’appel à l’avocat, le requérant voulait, selon l’agent Brochu, joindre un collègue de son cabinet d’avocats, soit Me Jonathan M. Fecteau qui lui connaissait un avocat pratiquant en droit criminel afin de le conseiller. Notons que le requérant avait mentionné à l’agent Brochu qu’il était avocat.

[142]     Vers 2 h, l’agent Brochu tente à deux reprises de communiquer avec MFecteau, mais il ne réussit qu’à joindre sa boîte vocale et n’a aucun souvenir d’avoir laissé un message. Notons que la déclaration sous serment de Me Fecteau indique qu’il a pu constater deux appels avec numéro bloqué sur son cellulaire entre 2 h et 2 h 05 et qu’aucun message n’a été laissé dans sa boîte vocale.

[143]     L’agent Brochu explique alors au requérant qu’il a le droit à l’assistance de l’avocat de son choix. Toutefois, il y a des délais à respecter pour l’alcootest. Il doit donc connaître un avocat lui-même et il ne peut commencer à appeler plusieurs avocats afin que l’un d’eux puisse lui référer un avocat qui pratique en droit criminel. En somme, s’il en connaît un lui-même, ils vont l’appeler.

[144]     En contre-interrogatoire, l’agent Brochu se souvient qu’avant de parler à MMilord, le requérant a demandé à parler à un autre collègue de son bureau, mais ne se souvient pas du nom de l’avocat, bien que le requérant lui suggère que c’est MSolomon. Notons que l’agent Brochu spécifie que le requérant lui demande d’appeler cet avocat (Me Solomon) afin qu’il puisse lui recommander un avocat criminaliste, comme lors des deux tentatives pour joindre Me Fecteau.

[145]     Par contre, l’agent Brochu refuse cette fois-ci de communiquer avec MSolomon. Voici son explication.

[146]     Il mentionne avoir été accommodant en acceptant de communiquer avec MFecteau. De plus, le requérant ne lui a jamais demandé d’appeler un avocat en particulier afin d’avoir des conseils juridiques, c’était plutôt pour se faire référer un avocat criminaliste. N’eût été cela, il n’aurait pas eu aucune objection à appeler MSolomon ou qui que ce soit.

[147]   Or, le requérant apporte certaines précisions à savoir que l’agent ne lui a jamais demandé si Me Fecteau était un avocat criminaliste avant de communiquer avec lui. Il ajoute candidement que cette discussion n’a jamais eu lieu puisqu’elle se serait passée comme quand il a demandé à parler avec Me Solomon. Finalement, il ne croit pas que les policiers savaient qu’il pratiquait en droit civil, seulement qu’il n’était pas un avocat criminaliste. En somme, puisqu’ils ne connaissent pas son cabinet d’avocats et leur champ de pratique, les policiers ne pouvaient pas automatiquement inférer que Me Fecteau n’était pas un avocat pratiquant en droit criminel.

[148]   Finalement, le requérant accepte de communiquer avec l’Aide Juridique à 2 h 07, tout en ne sachant pas, à ce moment-là, que l’agent Brochu n’avait laissé aucun  message dans la boîte vocale du cellulaire de Me Fecteau.

[149]   Dans ces circonstances, le Tribunal considère que l’agent Brochu n’a pas fourni au requérant la possibilité raisonnable de consulter l’avocat de son choix, au surplus le requérant s’est vu refuser de communiquer avec un tiers afin de pouvoir exercer ce droit.

[150]    Rappelons que le requérant a agi avec diligence raisonnable dans l’exercice de son droit à l’avocat de son choix et qu’il a eu une attitude et un comportement exemplaire à l’égard du travail des agents.

[151]   Certes, il est indéniable que l’agent Brochu a manqué à son devoir de faciliter l’exercice du droit du requérant de parler à l’avocat de son choix. Il n’y avait ici aucune urgence pour passer les tests.

[152]   En somme, de l’ensemble de la preuve, le Tribunal considère la version du requérant comme étant crédible et fiable alors que celle de l’agent Brochu, bien que crédible, est imprécise sur certains aspects factuels entourant l’exercice du droit du requérant de consulter l’avocat de son choix.

[153]   Dans les circonstances, le requérant s’est déchargé de son fardeau de prouver selon la prépondérance des probabilités qu’un de ses droits protégés par la Charte, soit celui d’avoir une possibilité raisonnable d’avoir recours à l’avocat de son choix, a été violé.

[154]   Par conséquent, le Tribunal conclut qu’il y a eu violation à l’article 10b) de la Charte.

[155]   Maintenant, le Tribunal doit décider si les éléments de preuve recueillis en violation de ce droit doivent ou non être exclus.

[156]     Au regard des trois critères des arrêts R. c. Grant[45] et R. c. Harrisson[46], le Tribunal considère que cette violation est grave[47] dans les circonstances du présent dossier, donnant ainsi lieu à l’exclusion des éléments de preuve obtenus à compter de la violation de ce droit constitutionnel du requérant, à savoir les échantillons d’haleine et les résultats obtenus par l’alcootest.

[157]     C’est plutôt l’inclusion de cette preuve qui déconsidérerait l’administration de la justice. Pour conclure ainsi, le Tribunal se réfère aux arrêts R. c. Lefebvre[48], R. c. Bélanger[49], R. c. Todd[50], R. v. Paul[51], R. c. Pilon[52], DPCP c. Girouard[53], R. c. Pinard[54]R. c. Gaétani[55], R. v.Vernon[56], R. v. Cullen[57], R. c. Lavallée[58], R. c. Pinsonneault[59], DPCP c. Kumps[60], DPCP c. Gauvreau[61], R. v. Soomal[62], R. v.Berger[63], R. v. Mourad[64], R. c. Grondin[65], R. c. Longtin[66], R. c. Marquis[67].

[158]     Voici le contexte motivant cette exclusion de la preuve.

[159]     À partir de la preuve entendue, le Tribunal considère que l’agent Brochu n’a pas agi dans le cadre de ses obligations ni n’est demeuré objectif, compréhensif ou à l’écoute du requérant. En effet, l’attitude rigide de l’agent Brochu et sa méconnaissance du droit du requérant de communiquer avec un tiers ont grandement contribué à la violation de ce droit de consulter l’avocat de son choix. Par ailleurs, l’agent Brochu n’avait aucun motif raisonnable pour refuser cette demande, surtout lorsque la personne arrêtée est calme et coopérative. En d’autres mots, le requérant n’a jamais tenté de faire inutilement ou injustement retarder la passation des tests. Il a même coopéré en acceptant d’appeler l’avocat de l’Aide Juridique, bien qu’il est de toute façon en situation de vulnérabilité face à l’agent. Notons que le requérant a une relation de travail, de confiance et d’amitié avec les deux avocats qu’il voulait parler.

[160]     Par ailleurs, il ne fait aucun doute que le résultat de l’analyse des échantillons d’haleine recueillis lors de l’alcootest que le requérant veut exclure à titre de réparation est un élément de preuve pertinent et fiable pour l’intimée. De plus, l’obtention minimalement intrusive de cet élément de preuve sur l’intégrité corporelle et la dignité du requérant milite dans l’inclusion de ceci au regard du critère de l’intérêt du public à ce que cette affaire soit jugée au fond, étant donné que l’alcool au volant est un fléau pouvant entraîner des conséquences graves.

[161]     Par ailleurs, rappelons que l’utilisation de cette preuve permet à l’intimée de prouver la commission de l’infraction prévue à l’article 253(1)b) du Code criminel. Il y a toutefois une violation délibérée ou flagrante à un droit important du requérant garanti par la Charte causée ici par la conduite délibérée, répréhensible et grave de l’agent Brochu privant ainsi le requérant d’exercer son droit à l’avocat de son choix. Le Tribunal estime devoir se dissocier de cette conduite attentatoire de l’État qui banalise le droit d’une personne arrêtée de recourir aux conseils de l’avocat de son choix. Ainsi, le refus de communiquer avec un avocat qui ne pratique pas en droit criminel et les efforts minimes de l’agent Brochu constituent, dans les circonstances de ce dossier, une méconnaissance flagrante, déraisonnable et inacceptable de l’étendue de son obligation d’un droit constitutionnel clair et bien établi, soit celle de faciliter l’exercice du droit à l’avocat de son choix du requérant. Ce qui ne permet pas par ailleurs comme en l’espèce d’établir sa bonne foi.

[162]     Toutefois, après avoir mis l’ensemble des facteurs en balance, le Tribunal conclut que l’utilisation de la preuve déconsidérerait l’administration de la justice à long terme.

[163]     Conséquemment, le Tribunal ordonne à titre de remède l’exclusion des éléments de preuve obtenus à compter de la violation de ce droit constitutionnel du requérant, à savoir les échantillons d’haleine et les résultats obtenus par l’alcootest.