Il n’existe aucune règle indiquant que le législateur est présumé vouloir limiter les pouvoirs qu’il confère à un tribunal d’origine législative en fonction de l’ampleur des incidences budgétaires découlant de l’exercice de ces pouvoirs. Dans la mesure où les motifs de la majorité de la Cour d’appel du Québec suggèrent le contraire, ils sont erronés en droit.
[20] Je suis d’avis que toute mesure correctrice qui est ordonnée doit protéger l’intérêt et les droits de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation. Une mesure correctrice de nature préventive ne peut donc être ordonnée que si l’enfant dont les droits ont été lésés est à risque de subir à nouveau la situation lésionnaire. Si c’est le cas, le tribunal peut ordonner toute mesure correctrice à même de contribuer efficacement à prévenir la récurrence de la situation lésionnaire, pourvu que cette mesure soit en lien avec la protection de l’intérêt et des droits de l’enfant. Les incidences budgétaires de la mesure correctrice n’ont pour leur part aucune conséquence sur la validité de celle-ci.
…
[27] Enfin, dans l’interprétation d’une disposition tel l’art. 91 al. 4, qui habilite un tribunal d’origine législative à exercer certains pouvoirs, je souligne que le principe de la séparation des pouvoirs ne crée d’emblée aucune limite à l’étendue des pouvoirs confiés par le législateur à ce tribunal. Le principe de la séparation des pouvoirs commande plutôt de donner plein effet à l’intention du législateur, telle qu’elle ressort de l’interprétation de cette disposition habilitante suivant la méthode moderne d’interprétation. Il n’existe aucune règle indiquant que le législateur est présumé vouloir limiter les pouvoirs qu’il confère à un tribunal d’origine législative en fonction de l’ampleur des incidences budgétaires découlant de l’exercice de ces pouvoirs (voir Ontario c. Criminal Lawyers’ Association of Ontario, 2013 CSC 43, [2013] 3 R.C.S. 3, par. 15 et 28). Dans la mesure où les motifs de la majorité de la Cour d’appel du Québec suggèrent le contraire, ils sont erronés en droit.
L’économie de la LPJ que le législateur a voulu que l’intervention du tribunal s’inscrive dans une logique de justice individualisée et particularisée, en fonction de l’intérêt et des droits de l’enfant particulier dont il est saisi de la situation.
[39] Il ressort de l’économie de la LPJ que le législateur a voulu que l’intervention du tribunal s’inscrive dans une logique de justice individualisée et particularisée, en fonction de l’intérêt et des droits de l’enfant particulier dont il est saisi de la situation. Dans une perspective de complémentarité fonctionnelle entre l’intervention sociale et l’intervention judiciaire, le tribunal doit, tout comme les représentants des directeurs de la protection de la jeunesse, prendre des décisions « dans l’intérêt de l’enfant et dans le respect de ses droits » (art. 3 al. 1) dans le but ultime « d’astreindre toute compromission à sa sécurité et son développement, mais également de prévenir la maltraitance » (E. Bernheim et M. Coupienne, « Faire valoir ses droits à la Chambre de la jeunesse : état des lieux des barrières structurelles à l’accès à la justice des familles » (2019), 32 Rev. can. d. fam. 237, p. 262-263, se référant à L. Mercier, « Contexte d’autorité et judiciarisation : régression ou redéfinition novatrice de la pratique sociale professionnelle? » (1991), 40:2 Service social 43, p. 49; voir aussi LPJ, art. 47.1, 51 à 51.8, et 52 et suiv.; m.i., par. 41 et 59, se référant à Lamothe c. Ruffo, [1998] R.J.Q. 1815 (C.S.), p. 1822; Ricard, p. 612-613 et 636). Chaque enfant étant unique, cette prise en considération s’exerce au cas par cas. Il s’agit d’une analyse intrinsèquement contextuelle, qui doit tenir compte, « outre les besoins moraux, intellectuels, affectifs et physiques de l’enfant, [de] son âge, sa santé, son caractère, son milieu familial et [d]es autres aspects de sa situation » (art. 3 al. 2; voir aussi Gordon c. Goertz, 1996 CanLII 191 (CSC), [1996] 2 R.C.S. 27, par. 38 et 44; A.C. c. Manitoba (Directeur des services à l’enfant et à la famille), 2009 CSC 30, [2009] 2 R.C.S. 181, par. 89-90; Barendregt c. Grebliunas, 2022 CSC 22, par. 97; B.J.T. c. J.D., 2022 CSC 24, par. 53).
Il ressort de l’étude de l’économie de la LPJ que le législateur québécois conçoit la protection de la jeunesse du Québec comme une responsabilité collective. Il a créé un système de protection de la jeunesse dont le bon fonctionnement dépend de l’action de divers acteurs politiques, sociaux et juridiques auxquels sont attribués des rôles, responsabilités et pouvoirs à la fois distincts et complémentaires.
[44] Il ressort de l’étude de l’économie de la LPJ que le législateur québécois conçoit la protection de la jeunesse du Québec comme une responsabilité collective. Il a créé un système de protection de la jeunesse dont le bon fonctionnement dépend de l’action de divers acteurs politiques, sociaux et juridiques auxquels sont attribués des rôles, responsabilités et pouvoirs à la fois distincts et complémentaires.
Compte tenu de l’économie de la LPJ, le tribunal a pour mandat de rendre justice de manière individualisée et particularisée en fonction de l’intérêt et des droits de l’enfant dont il est saisi de la situation. Il n’est pas l’acteur choisi par le législateur pour examiner de manière critique le système de protection de la jeunesse dans son ensemble et le réformer. Ce rôle est plutôt confié à d’autres : le ministre de la Santé et des Services sociaux, la CDPDJ et, notamment, depuis 2022, le directeur national de la protection de la jeunesse.
[50] Compte tenu de l’économie de la LPJ, le tribunal a pour mandat de rendre justice de manière individualisée et particularisée en fonction de l’intérêt et des droits de l’enfant dont il est saisi de la situation. Il n’est pas l’acteur choisi par le législateur pour examiner de manière critique le système de protection de la jeunesse dans son ensemble et le réformer. Ce rôle est plutôt confié à d’autres : le ministre de la Santé et des Services sociaux, la CDPDJ et, notamment, depuis 2022, le directeur national de la protection de la jeunesse.
[51] Force est d’admettre que le législateur n’a pas voulu accorder au tribunal des pouvoirs outrepassant ceux nécessaires pour l’accomplissement du mandat qu’il lui a confié. Si, en matière de lésion de droits, le législateur avait voulu se distancier de cette vision de l’intervention judiciaire individualisée et particularisée qui colore l’entièreté de la LPJ et permettre au tribunal de rendre des ordonnances visant des enfants dont il n’est pas saisi des situations, il l’aurait fait en termes explicites. À titre d’exemple, il aurait pu lui conférer clairement le pouvoir de rendre des ordonnances dans l’intérêt public ou encore indiquer expressément qu’il doit prendre ses décisions en tenant compte non seulement de l’intérêt de l’enfant devant lui, mais également de celui des enfants. Or, il ne l’a pas fait.
…
[60] Bref, je suis d’avis que l’historique législatif de l’art. 91 al. 4 et d’autres dispositions connexes portant sur la lésion de droits confirme ce que l’économie de la LPJ révèle déjà : le tribunal ne peut se saisir que de la situation d’un enfant à la fois. En outre, rien ne tend à indiquer que le législateur ait voulu habiliter le tribunal à ordonner des mesures correctrices visant des enfants dont il n’est pas saisi des situations, mais qui pourraient se trouver dans la même situation lésionnaire que l’enfant devant lui. Enfin, le tribunal doit corriger la situation à l’origine de la lésion des droits de l’enfant. L’historique législatif n’indique toutefois pas si le tribunal peut également chercher à corriger les conséquences de la lésion sur l’état psychologique ou physique de l’enfant.
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[63] Cela dit, il est indéniable que les États parties à la [Convention relative au droit de l’enfant] disposent d’une marge de discrétion pour déterminer les mesures appropriées afin d’assurer la promotion de l’intérêt supérieur de l’enfant et la protection de ses droits (voir CRDE, article 4; J. Tobin, « Article 4. A State’s General Obligation of Implementation », dans J. Tobin, dir., The UN Convention on the Rights of the Child : A Commentary (2019), 108, p. 111-112). Je suis d’accord avec la DPJ lorsqu’elle affirme que rien n’indique que pour se conformer à la CRDE les législateurs provinciaux et territoriaux doivent, en cas de lésion de droits, accorder aux tribunaux le mandat et les pouvoirs nécessaires pour se préoccuper de la protection de l’intérêt et des droits de plus d’un enfant à la fois (voir m.i., par. 39, citant Nations Unies, Comité des droits de l’enfant, Observation générale no 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale (art. 3, par. 1), Doc. N.U. CRC/C/GC/14, 29 mai 2013, par. 32).
Les pouvoirs correctifs confiés au tribunal par l’art. 91 al. 4 doivent être interprétés de manière large et libérale, de façon à assurer l’accomplissement de cet objectif de protection de l’enfant, qui est consacré sans détour dans la Charte québécoise et dans la CRDE (Charte québécoise, art. 39; CRDE, article 3; voir aussi Code civil du Québec, art. 32; Loi d’interprétation, art. 41; Protection de la jeunesse – 123979, par. 21).
[66] Les pouvoirs correctifs confiés au tribunal par l’art. 91 al. 4 doivent être interprétés de manière large et libérale, de façon à assurer l’accomplissement de cet objectif de protection de l’enfant, qui est consacré sans détour dans la Charte québécoise et dans la CRDE (Charte québécoise, art. 39; CRDE, article 3; voir aussi Code civil du Québec, art. 32; Loi d’interprétation, art. 41; Protection de la jeunesse – 123979, par. 21). Il faut concevoir de façon généreuse les différents types de mesures correctrices qui peuvent être ordonnées afin d’assurer la protection la plus complète possible de l’enfant dont les droits ont été lésés. Par « protection complète », j’entends une protection qui vise à la fois le présent et le futur, et qui tient compte autant des circonstances à l’origine de la lésion des droits de l’enfant que de ses conséquences sur son état psychologique et physique.
[67] À ce sujet, je suis d’avis que l’interprétation mise de l’avant par la CDPDJ — dans la mesure où elle met exclusivement l’accent sur la correction des circonstances à l’origine de la lésion de droits — mine la capacité du tribunal à protéger l’intérêt et les droits de l’enfant devant lui dans un cas donné. En effet, une telle interprétation est incompatible avec la possibilité d’ordonner des mesures correctrices pour remédier aux conséquences négatives d’une lésion de droits sur l’état psychologique ou physique de l’enfant. À certains égards, l’interprétation de la CDPDJ semble aussi limiter le type de mesures correctrices préventives qui peuvent être ordonnées. Au-delà de la correction de la situation à l’origine de la lésion de droits, il faut à mon avis que le tribunal puisse aussi ordonner des mesures correctrices préventives qui suivront l’enfant dans le système afin de faire en sorte que celui-ci soit adéquatement protégé à l’avenir.
Le tribunal peut ordonner des mesures correctrices qui visent les objectifs suivants :
(1) faire cesser la situation lésionnaire si celle-ci lèse toujours les droits de l’enfant;
(2) remédier aux conséquences psychologiques ou physiques que vit l’enfant en raison de la lésion de droits; et
(3) éviter que la situation lésionnaire ne se reproduise pour cet enfant.
Il découle de ce qui précède qu’une mesure correctrice de nature préventive ne peut être ordonnée que si l’enfant dont les droits ont été lésés est à risque de subir à nouveau la situation lésionnaire. Le fait que d’autres enfants dont le tribunal n’est pas saisi des situations pourraient bénéficier de la mesure correctrice préventive n’est pas suffisant, en soi, pour permettre au tribunal de l’ordonner.
[71] Une interprétation large et libérale de l’art. 91 al. 4, qui assure l’accomplissement de l’objectif général de protection de l’enfant tout en tenant compte du texte, de l’économie de la loi et du contexte, m’amène à conclure que le législateur a voulu conférer au tribunal les pouvoirs nécessaires pour assurer une protection complète de l’intérêt et des droits de l’enfant dont il est saisi de la situation. J’entends par là une protection qui vise à la fois le présent et le futur, et qui tient compte autant des circonstances à l’origine de la lésion de droits que de ses conséquences sur l’état psychologique et physique de l’enfant. Concrètement, cela signifie à mon avis que le tribunal peut ordonner des mesures correctrices qui visent les objectifs suivants : (1) faire cesser la situation lésionnaire si celle-ci lèse toujours les droits de l’enfant; (2) remédier aux conséquences psychologiques ou physiques que vit l’enfant en raison de la lésion de droits; et (3) éviter que la situation lésionnaire ne se reproduise pour cet enfant. Il s’ensuit que le tribunal peut ordonner une vaste gamme de mesures correctrices afin de rendre justice avec flexibilité et créativité dans chaque cas.
[72] Il découle de ce qui précède qu’une mesure correctrice de nature préventive ne peut être ordonnée que si l’enfant dont les droits ont été lésés est à risque de subir à nouveau la situation lésionnaire. Le fait que d’autres enfants dont le tribunal n’est pas saisi des situations pourraient bénéficier de la mesure correctrice préventive n’est pas suffisant, en soi, pour permettre au tribunal de l’ordonner.
[73] Contrairement à ce que plaide la CDPDJ, cette conclusion n’est pas absurde, déraisonnable ou incompatible avec l’objectif général de protection des enfants vulnérables qui imprègne la LPJ (m.a., par. 57-58). Elle reflète plutôt de manière fidèle les moyens préconisés par le législateur pour garantir la protection de l’intérêt et des droits des enfants visés par une intervention sociale en vertu de la LPJ. En ce qui concerne le tribunal, ces moyens s’articulent autour d’une justice individualisée et particularisée. Le fait que la CDPDJ préconiserait d’autres moyens qu’elle juge plus efficaces pour réaliser cet objectif général de protection des enfants vulnérables du Québec — par exemple en accordant au tribunal le pouvoir de rendre des ordonnances dans l’intérêt public ou dans l’intérêt des enfants visés par une intervention en vertu de la LPJ — n’est pas suffisant pour taxer d’absurde ou de déraisonnable l’interprétation qui s’impose au terme de l’étude du texte de la disposition, de l’économie de la loi, du contexte et de l’objet.
Le fait que le tribunal ne puisse ordonner que des mesures correctrices qui visent à protéger l’intérêt et les droits de l’enfant dont il est saisi de la situation ne signifie pas pour autant que, pour être valide, l’ordonnance doit nécessairement nommer explicitement cet enfant. Soutenir le contraire serait une erreur de droit. De plus, cela ne veut pas dire qu’une mesure correctrice ne peut pas avoir pour conséquence indirecte et accessoire de protéger l’intérêt et les droits d’autres enfants qui pourraient se trouver dans la même situation lésionnaire que celle de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation. Enfin, cela ne signifie pas non plus que le tribunal ne peut ordonner des mesures correctrices pour enrayer une pratique systémique ou institutionnelle.
[74] En outre, comme nous le verrons plus en détail dans la prochaine section, le fait que le tribunal ne puisse ordonner que des mesures correctrices qui visent à protéger l’intérêt et les droits de l’enfant dont il est saisi de la situation ne signifie pas pour autant que, pour être valide, l’ordonnance doit nécessairement nommer explicitement cet enfant. Soutenir le contraire serait une erreur de droit. De plus, cela ne veut pas dire qu’une mesure correctrice ne peut pas avoir pour conséquence indirecte et accessoire de protéger l’intérêt et les droits d’autres enfants qui pourraient se trouver dans la même situation lésionnaire que celle de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation. Enfin, cela ne signifie pas non plus que le tribunal ne peut ordonner des mesures correctrices pour enrayer une pratique systémique ou institutionnelle. En effet, rien n’empêche le tribunal d’ordonner une telle mesure correctrice, à condition que l’enfant dont les droits ont été lésés soit à risque de subir à nouveau la situation lésionnaire, que la mesure correctrice soit à même de contribuer efficacement à prévenir la récurrence de la situation lésionnaire et qu’elle soit en lien avec la protection de l’intérêt et des droits de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation. J’y reviendrai.
[75] Je tiens ici à souligner que l’interprétation que je préconise de l’art. 91 al. 4 s’arrime avec les interprétations judiciaires de l’art. 91 al. 4 adoptées jusqu’à ce jour. Il survient déjà des cas où le tribunal ordonne des mesures correctrices pour faire cesser une situation lésionnaire qui est toujours en cours au moment de la déclaration de lésion de droits. C’est le cas, par exemple, lorsque la situation lésionnaire résulte d’une absence de suivi psychologique alors que l’état de l’enfant le requiert et que cette absence de suivi perdure au moment de l’audience. Le tribunal ordonne dans un tel cas les mesures correctrices nécessaires pour mettre fin à l’absence de suivi (voir, p. ex., Protection de la jeunesse – 174220, 2017 QCCQ 9973, par. 41-51 et 68-69).
[76] De même, si la lésion de droits a engendré des conséquences négatives pour l’enfant sur le plan physique ou psychologique, le tribunal peut parfois ordonner des mesures aptes à remédier à ces conséquences ou à améliorer son état. À titre d’exemple, il arrive que le tribunal ordonne la fourniture de services sociaux devenus nécessaires en raison des conséquences négatives de la lésion de droits sur l’enfant ou encore qu’il ordonne au directeur de la protection de la jeunesse d’assumer les frais afférents à une démarche thérapeutique devenue nécessaire en raison d’une situation lésionnaire causée par le directeur de la protection de la jeunesse (voir, p. ex., Protection de la jeunesse – 175726, 2017 QCCQ 10171, par. 111, 113 et 135; Protection de la jeunesse – 1610815, 2016 QCCQ 20163, par. 17-18, 67-75 et 105; Protection de la jeunesse – 202094, 2020 QCCQ 1912, par. 109-118, 123-124 et 130-131; M. Provost, Droit de la protection de la jeunesse (3e éd. 2022), p. 287-289). Dans la même optique, il peut être justifié d’ordonner à la personne, à l’organisme ou à l’établissement ayant lésé les droits de l’enfant de formuler des excuses écrites à ce dernier et à sa famille dans le but d’offrir une forme de consolation et de rétablir le lien de confiance avec le système de protection de la jeunesse (voir Protection de la jeunesse – 212922, 2021 QCCQ 5132, par. 701-702).
[77] Enfin, il est également fréquent que le tribunal ordonne des mesures correctrices pour éviter que la situation lésionnaire se reproduise pour l’enfant dont les droits ont été lésés. Il est reconnu dans la jurisprudence que, même si la situation lésionnaire a pris fin au moment de l’audience, cela n’empêche pas le tribunal de rendre des ordonnances préventives pour éviter que la situation lésionnaire ne se reproduise pour l’enfant dont il est saisi de la situation (Protection de la jeunesse – 123979, par. 20-26; Ricard, p. 632). À titre d’exemple, le tribunal peut ordonner, comme mesure correctrice, qu’une formation soit dispensée à une intervenante pour lui démontrer l’importance de respecter certains principes fondamentaux régissant les interventions sociales en vertu de la LPJ afin qu’elle soit mieux à même, à l’avenir, d’établir et de maintenir un lien de confiance avec l’enfant et ses parents (Protection de la jeunesse – 123979, par. 21; S. Papillon, « Le jugement en matière de lésion de droits de la Chambre de la jeunesse : où en sommes-nous? » (2015), 56 C. de D. 151, p. 176). Dans la même veine, le tribunal peut ordonner que son jugement soit signifié à des acteurs chargés de porter un regard global sur le système et de collaborer à sa réforme (voir, p. ex., Protection de la jeunesse – 2023, 2020 QCCQ 61, par. 331 et 456; Protection de la jeunesse – 137151, 2013 QCCQ 17367, par. 85-87 et 93) ou encore recommander à la CDPDJ d’enquêter sur une situation problématique afin de formuler les recommandations qui s’imposent au ministre de la Santé et des Services sociaux (voir, p. ex., Protection de la jeunesse – 171278, 2017 QCCQ 2752, par. 73-74 et 80).