Le critère du consentement soulevé par l’appelant ne s’ajoute aux autres que dans les cas de possession dite conjointe ou commune, c’est-à-dire lorsque l’objet se trouve en la possession personnelle d’un tiers, mais que la personne accusée, même en son absence, le cas échéant, en a connaissance et exerce un certain contrôle sur l’objet.
[3] Il importe de rappeler brièvement le contexte de l’affaire. Le petit véhicule deux portes dans lequel l’appelant est seul passager arrière est intercepté par des policiers après qu’il eut dévié de sa voie au beau milieu de la nuit. En s’approchant de l’automobile, l’agent de police aperçoit immédiatement sur la banquette arrière, à quelques centimètres de l’appelant, un coup-de-poing américain en métal de couleur or. L’appelant ne fait aucun geste pour camoufler l’arme ou pour s’en départir. Tout comme les deux autres occupants du véhicule assis à l’avant, il déclare que ni l’arme ni le véhicule ne lui appartiennent. L’appelant et les autres occupants sont arrêtés pour possession d’une arme prohibée. Les agents fouillent par la suite le véhicule et trouvent un bâton de bois pouvant faire office d’arme, un couteau à lame repliable et plusieurs petits sachets de plastique contenant des résidus de cocaïne.
[4] Dans un jugement rendu oralement, le juge conclut que la poursuite s’est déchargée de son fardeau de prouver hors de tout doute raisonnable la possession de l’appelant du coup-de-poing américain trouvé à ses côtés, en démontrant les deux éléments essentiels à cette infraction : la connaissance et le contrôle par l’appelant de l’arme. Quant à l’élément de connaissance, par ailleurs admis au procès par l’appelant, le juge précise que l’arme était bien visible et placée à quelques pouces de l’endroit où il était assis. Quant à l’élément de contrôle, le juge estime qu’en vertu de la preuve circonstancielle présentée, l’appelant pouvait manifestement exercer une forme de contrôle sur l’arme. L’appelant est déclaré coupable des deux chefs d’accusation.
…
[6] Le juge n’a pas commis d’erreur et a correctement identifié les éléments de l’infraction de possession, soit la connaissance et le contrôle sur l’objet, lesquels doivent être conjugués, comme l’explique bien la Cour suprême dans R. c. Morelli, 2010 CSC 8 :
[16] Dans le cas d’une allégation de possession personnelle, le critère de la connaissance est formé des deux éléments suivants : l’accusé doit savoir qu’il a la garde physique de la chose donnée et il doit connaître la nature de cette dernière. Il faut en outre que ces deux éléments soient conjugués à un acte de contrôle (qui ne procède pas d’un devoir civique) : Beaver c. The Queen, 1957 CanLII 14 (SCC), [1957] R.C.S. 531, p. 541‑542.
[7] Le critère du consentement soulevé par l’appelant ne s’ajoute aux autres que dans les cas de possession dite conjointe ou commune, c’est-à-dire lorsque l’objet se trouve en la possession personnelle d’un tiers, mais que la personne accusée, même en son absence, le cas échéant, en a connaissance et exerce un certain contrôle sur l’objet[1].
Comme le soutient l’intimé, le juge met en lumière le fait que depuis l’arrêt Marc, la Cour accepte que l’endroit où se trouve l’objet illicite puisse constituer un élément pertinent de la possession, selon les circonstances propres à chaque affaire, en sus des autres éléments de preuve analysés.
[8] En l’espèce, les éléments relatifs à la possession personnelle de l’appelant étaient présents puisque ce dernier avait la connaissance et le contrôle de l’arme prohibée qui se trouvait à côté de lui sur la banquette au moment de son arrestation et que lui seul a été reconnu coupable de possession de l’arme. Certes, l’appelant n’avait pas de contact physique direct avec celle-ci et il est vrai, comme l’a récemment rappelé notre Cour, que la simple présence sur les lieux où se trouve l’objet illégal ne suffit pas à conclure à la possession de celui-ci[2]. Il ressort toutefois des motifs du juge que la grande proximité de l’appelant avec l’arme prohibée dans un habitacle très exigu pouvait manifestement l’amener à conclure qu’il exerçait une forme de contrôle sur l’arme à ce moment. L’absence de manipulation de l’arme n’exclut pas en soi, l’exercice d’un certain contrôle de celle-ci selon les circonstances de l’espèce[3], et ce contrôle peut se prouver par un degré suffisant de proximité conjugué à l’élément de connaissance.
[9] À cet égard, la Cour dans l’arrêt Vernelus c. R., 2022 QCCA 138[4] a reconnu que la juge d’instance pouvait inférer la possession d’une arme retrouvée dans un sac situé au pied de l’accusé dans une voiture.
[10] Ainsi, et contrairement à ce que plaide l’appelant, le juge n’a pas erré dans son interprétation des arrêts Landry[5] et Marc[6], rendus par la Cour et a correctement cerné l’état du droit en la matière. Comme le soutient l’intimé, le juge met en lumière le fait que depuis l’arrêt Marc, la Cour accepte que l’endroit où se trouve l’objet illicite puisse constituer un élément pertinent de la possession, selon les circonstances propres à chaque affaire, en sus des autres éléments de preuve analysés. À bon droit, le juge précise qu’il n’existe pas de présomption selon laquelle le seul fait d’occuper une pièce permettrait de conclure à la possession, mais que néanmoins, l’endroit où se trouve l’objet peut être pertinent dans l’évaluation de cette infraction. Ainsi, la Cour n’identifie aucune erreur du juge dans l’identification du cadre d’analyse applicable à la possession personnelle et dans son application aux faits de l’espèce.