Quand la preuve de l’intoxication volontaire est-elle pertinente et à quelles conditions?

  1. L’intoxication légère n’est jamais un moyen de défense acceptable (Daley).
  1. Pour l’intoxication avancée :

A)    on doit d’abord déterminer si l’infraction en est une d’intention spécifique ou générale. À se rappeler que l’on n’utilise la distinction que dans ces circonstances particulières de l’intoxication volontaire (Bernard).

L’infraction d’intention spécifique est celle qui réfère à un but ou dessein ultérieur additionnel qui n’est pas lié aux éléments de l’actus reus (« dans l’intention de »; « dans le but de », « afin de », etc.). Le meurtre est une infraction d’intention spécifique aux fins de ce moyen de défense même si l’intention réfère à un élément de l’actus reus et ce, pour des raisons historiques.

B)    Crimes d’intention spécifique : la preuve de l’intoxication volontaire est pertinente SI l’intoxication est suffisamment avancée (sans pour autant être nécessairement extrême) pour nier l’existence de cette intention spécifique – on plaide l’absence de l’intention spécifique de cette infraction. Ne sera pas acceptée l’intoxication pour se donner du courage ou pour enlever les inhibitions ni l’explication selon laquelle on n’aurait jamais commis de tels actes à jeun. (Leary;  Bernard.)

Daley : dans les directives du juge au jury:

–          Le juge doit récapituler les faits pertinents et faire état des moyens de défense, mais il n’est pas tenu de revenir sur la totalité de la preuve;

–          Il sera suffisant de faire le lien entre l’alcool et la mens rea de façon générale (que l’alcool peut affecter l’intention), mais il n’est pas nécessaire de revenir sur le fait que l’alcool affecte de façon particulière la prévisibilité des conséquences;

–          Il n’est ni souhaitable ni nécessaire que le juge donne son interprétation de la preuve d’expert ou ne revienne sur celle-ci;

–          Il n’est pas nécessaire que le juge insiste spécifiquement sur le fait que la déduction de faits (selon laquelle une personne saine et sobre qui pose des gestes dont les conséquences sont prévisibles est présumée avoir voulu les conséquences de ceux-ci) peut être écartée ou renversée par la preuve d’intoxication avancée pourvu qu’il mentionne que l’application de cette déduction n’est pas automatique ou peut généralement être renversée par une preuve contraire.

C)    Crimes d’intention générale : la preuve de l’intoxication volontaire avancée n’est pas pertinente ni acceptée pour nier l’intention générale d’une infraction.

  1. Intoxication extrême : la preuve de l’intoxication extrême n’est pas pertinente ni acceptée pour nier l’intention générale de cette infraction lorsque l’intégrité physique est menacée (art. 33.1 C.cr.).

Qu’est-ce que ‘crimes qui portent atteinte à l’intégrité physique des personnes’?

–          Exclut toutes formes de voies de fait (et donc en vertu de l’article 265(2) toutes formes d’agressions sexuelles).

–          Exclut certainement les crimes contre les personnes de façon générale et tous les crimes où on retrouve de la violence et l’utilisation de la force contre quelqu’un.

La preuve de l’intoxication extrême est toujours admissible pour contrer l’intention générale pour les infractions contre les biens qui ne menacent pas l’intégrité physique. Il y a donc des cas où 33.1 ne s’appliquerait pas et où on pourrait plaider l’intoxication volontaire extrême.

Dans les cas d’intoxication extrême toujours admissibles, il faut respecter les règles de Daviault :

1)      État d’intoxication extrême voisin de l’automatisme ou aliénation mentale;

2)      Preuve d’expert à l’appui

3)      Preuve par prépondérance des probabilités

L’intoxication extrême se rapporte à l’aspect volontaire de la conduite (actus reus) depuis Stone. Cet élément a été constitutionnalisé comme un principe de justice fondamentale (art. 7) dans Daviault.

  1. L’intoxication ne pourra jamais être invoquée dans les cas où l’état d’ébriété est un élément essentiel de l’infraction : conduite avec facultés affaiblies. (arrêt Penno : non obligatoire)
  1. L’intoxication volontaire, sauf l’intoxication extrême qui est reliée avec l’actus reus, ne pourra pas être utilisée pour les crimes de responsabilité absolue ni crimes de négligence. Ça prend des infractions avec une MR subjective.

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