Une cour d’appel a compétence pour soulever de nouvelles questions et pour inviter les parties à présenter des observations sur une question que ni l’une ni l’autre n’a soulevée. Une question est nouvelle lorsqu’elle constitue un nouveau fondement sur lequel on pourrait s’appuyer — autre que les moyens d’appel formulés par les parties — pour conclure que la décision frappée d’appel est erronée. Les questions qui reposent sur une question existante ou qui en sont des éléments ne sont pas de nouvelles questions, tout comme celles qui forment la toile de fond de l’instance d’appel n’en sont pas non plus. En outre, ce ne sont pas toutes les questions posées par une cour d’appel qui sont de nouvelles questions. Celles soulevées à l’audience peuvent valablement porter sur une gamme étendue de sujets, qui peuvent être des éléments des moyens d’appel mis de l’avant par les parties, ou aller au‑delà de ces moyens dans le but de comprendre le contexte factuel ou législatif, ou les implications plus larges du débat. Pourvu que l’impartialité ne soit pas mise en cause, les questions soulevées à l’audience, qu’elles soient ou non liées directement ou par extension aux moyens d’appel, ne sont pas inappropriées.
Même si une cour d’appel dispose du pouvoir discrétionnaire de soulever une nouvelle question, elle ne doit l’exercer que dans de rares situations. En effet, elle ne doit soulever une telle question que si son omission de le faire risquerait d’entraîner une injustice. Ce pouvoir discrétionnaire est limité en toutes circonstances par l’exigence suivant laquelle, en soulevant la nouvelle question, la cour ne doit pas donner l’impression qu’elle a un parti pris ou qu’elle fait preuve de partialité. Il ne faut pas que les tribunaux soient vus comme étant en quête d’un tort à rectifier. Lorsqu’il existe une bonne raison de croire que le résultat aurait réalistement été différent si l’erreur n’avait pas été commise, ce risque d’injustice justifie l’intervention de la cour d’appel. La norme de la « bonne raison de croire » que l’omission de soulever une nouvelle question « risquerait d’entraîner une injustice » est un seuil élevé et nécessaire dans ce contexte afin d’établir un équilibre approprié entre le rôle des cours d’appel en tant qu’arbitres indépendants et impartiaux et le besoin de veiller à ce que justice soit rendue. Pour soulever une nouvelle question, la cour doit aussi se demander si elle a compétence pour l’examiner, s’il y a suffisamment d’éléments au dossier pour la trancher et si l’une ou l’autre des parties subirait un préjudice d’ordre procédural advenant le cas où la cour en question soulevait une nouvelle question.
Lorsqu’une cour d’appel soulève une nouvelle question, les parties doivent en être notifiées et avoir l’occasion d’y répondre. La cour d’appel doit aviser les parties qu’elle a cerné une question susceptible de se poser et veiller à ce que les parties en soient suffisamment informées pour qu’elles puissent se préparer et y répondre. Prescrire des normes de procédure rigoureuses ferait abstraction du fait que la question peut se présenter dans diverses situations selon les dossiers. La cour doit soulever la question dès qu’il est pratiquement possible de le faire après que la question se cristallise afin d’éviter tout retard indu dans le déroulement de l’instance. Toutefois, la notification de la nouvelle question peut se faire avant l’audience, ou la question être soulevée à l’audience. La notification ne doit pas renfermer trop de détails ou indiquer que la cour d’appel s’est déjà formé une opinion. Toutefois, elle doit renfermer assez d’information pour permettre aux parties de répondre à la nouvelle question. Les exigences relatives à la réponse dépendront de la question particulière soulevée par la cour. Les procureurs voudront peut‑être simplement présenter des observations orales sur le sujet, plutôt déposer d’autres arguments écrits ou faire les deux. L’enjeu sous‑jacent est de faire en sorte que la cour reçoive des observations complètes sur la nouvelle question. Si une partie demande à présenter des observations écrites avant ou après l’audience, il doit y avoir une présomption en faveur de l’acceptation de la demande. La récusation devrait être rare et elle doit être régie par la considération prépondérante de savoir si la nouvelle question ou la façon dont elle a été soulevée pourrait susciter une crainte raisonnable de partialité.