L’art. 163.1 pourrait être considéré comme incorporant une exception applicable à la possession :
1. de matériel expressif créé par l’intéressé : c’est-à-dire les écrits ou représentations créés par l’accusé seul et conservés par ce dernier exclusivement pour son usage personnel;
2. d’enregistrements privés d’une activité sexuelle légale : c’est-à-dire tout enregistrement visuel créé par l’accusé ou dans lequel ce dernier figure, qui ne représente aucune activité sexuelle illégale et qui est conservé par l’accusé exclusivement pour son usage personnel.
[26] Partant du constat que la disposition législative est « substantiellement constitutionnelle et marginalement problématique », la majorité de la Cour détermine la réparation qui s’impose. Elle résout les applications problématiques en incluant une exception par interprétation large (« reading in »), laquelle est ainsi définie[8] :
En l’espèce, l’art. 163.1 pourrait être considéré comme incorporant une exception applicable à la possession :
1. de matériel expressif créé par l’intéressé : c’est-à-dire les écrits ou représentations créés par l’accusé seul et conservés par ce dernier exclusivement pour son usage personnel;
2. d’enregistrements privés d’une activité sexuelle légale : c’est-à-dire tout enregistrement visuel créé par l’accusé ou dans lequel ce dernier figure, qui ne représente aucune activité sexuelle illégale et qui est conservé par l’accusé exclusivement pour son usage personnel.
[27] Cette exception s’applique également à l’infraction de « production de pornographie juvénile » prévue au paragraphe 163.1(2) C.cr.[9]. La Cour suprême mentionne que la première catégorie vise à protéger « les expressions écrites ou visuelles de la pensée créées par une seule personne et conservées par celle-ci pour son seul usage personnel »[10]. Elle donne pour exemple le journal intime de l’adolescent, de même que « toute autre œuvre écrite ou représentation créée par une seule personne, qui est en la possession exclusive de cette personne et qui est destinée à être vue uniquement par elle »[11].
L’exception proposée ne s’applique qu’au matériel qui ne présente qu’un risque négligeable de préjudice pour les enfants, mais qui touche profondément aux valeurs consacrées par l’al. 2b) et au droit à la liberté garanti par l’art. 7, en raison de sa nature extrêmement privée et de son lien potentiel avec l’épanouissement personnel et la réalisation de soi.
[28] En dernière analyse, la Cour suprême insiste sur le fait que « l’exception proposée ne s’applique qu’au matériel qui ne présente qu’un risque négligeable de préjudice pour les enfants, mais qui touche profondément aux valeurs consacrées par l’al. 2b) et au droit à la liberté garanti par l’art. 7, en raison de sa nature extrêmement privée et de son lien potentiel avec l’épanouissement personnel et la réalisation de soi ». Elle reconnaît que « l’application des catégories d’exceptions peut soulever certaines questions », mais juge que, en définitive, « il appartiendra aux tribunaux de se pencher sur des questions d’interprétation précises lorsqu’elles seront soulevées, en tenant compte de l’objectif fondamental du législateur, qui est d’interdire la possession de pornographie juvénile suscitant une crainte raisonnée qu’un préjudice ne soit causé à des enfants ».
[29] En l’espèce, le juge n’a commis aucune erreur dans l’appréciation de la preuve qui lui a été présentée au procès ni dans l’interprétation et l’application de la défense prétorienne établie dans l’arrêt Sharpe. Sa conclusion voulant que « le contenu des dessins ne provient pas exclusivement de l’imaginaire de l’accusé » trouve amplement assise dans la preuve. Le témoignage de l’accusé établit clairement qu’il se servait des images imprimées, récupérées sur Internet, pour s’inspirer dans la création de ses dessins, allant même jusqu’à calquer les personnes et les scènes sexuelles qui y apparaissaient.
Ensuite, le fait que l’accusé calque ses dessins à partir d’images tirées sur Internet fait échec au premier moyen de défense. Les dessins de l’appelant ne s’apparentent pas aux « rêveries personnelles » auxquelles réfère la Cour suprême. Cette exception ne peut permettre à des citoyens de posséder ou de produire de la pornographie juvénile créée à partir de photographies qui présentent des enfants exploités, et ce, même s’il s’agit d’œuvres créées dans un but d’épanouissement personnel. Le mode de production des dessins de l’appelant ne peut être couvert par l’exception visant les « expressions écrites ou visuelles de la pensée créées par une seule personne ». Pour que celle-ci s’applique, les dessins doivent être produits à partir de l’imaginaire de son créateur, sans quoi les considérations liées à la liberté d’expression, protégée par l’article 2b) de la Charte, deviennent nettement moins pressantes.
[30] Ensuite, le fait que l’accusé calque ses dessins à partir d’images tirées sur Internet fait échec au premier moyen de défense. Les dessins de l’appelant ne s’apparentent pas aux « rêveries personnelles » auxquelles réfère la Cour suprême[12]. Cette exception ne peut permettre à des citoyens de posséder ou de produire de la pornographie juvénile créée à partir de photographies qui présentent des enfants exploités, et ce, même s’il s’agit d’œuvres créées dans un but d’épanouissement personnel. Le mode de production des dessins de l’appelant ne peut être couvert par l’exception visant les « expressions écrites ou visuelles de la pensée créées par une seule personne ». Pour que celle-ci s’applique, les dessins doivent être produits à partir de l’imaginaire de son créateur, sans quoi les considérations liées à la liberté d’expression, protégée par l’article 2b) de la Charte, deviennent nettement moins pressantes[13].
[31] Par ailleurs, on ne peut prétendre que le matériel en question « ne suscite aucune crainte raisonnée qu’un préjudice ne soit causé à des enfants ». Le risque de préjudice ici présent n’est pas négligeable. Le juge en est conscient lorsqu’il écrit : « le fait que l’accusé a utilisé des modèles contenant de la pornographie juvénile pour calquer, et non seulement pour stimuler son imaginaire, afin de mieux se représenter dans les dessins implique qu’un préjudice a été causé à des enfants qui ont servi de modèle, et ce au sens direct, dans le processus de création de dessins de l’accusé ».