C.G. c. R., 2020 QCCA 819

MISE EN GARDE : Ordonnance limitant la publication : Il est interdit de publier ou diffuser de quelque façon que ce soit tout renseignement qui permettrait d’établir l’identité de la victime ou d’un témoin (article 486.4 C.cr.).

Le public bien informé, même choqué par les comportements criminels en cause, sait que l’appel fait partie du processus pénal et lorsqu’il n’est pas futile, il est important et participe à un système de justice juste et légitime

[13] Deuxièmement, bien qu’un examen des moyens d’appel doive aussi être effectué lors de l’examen du critère de l’intérêt public, pour le soupeser cette fois en regard de la gravité des infractions, j’estime qu’en l’espèce ce degré de gravité ne dilue pas la qualité des moyens d’appel de l’appelant au point de conclure qu’il échoue à satisfaire ce critère.

[14] Comme le soulignait le juge Moldaver dans l’arrêt Oland[5]:

[51] (…), lorsque les préoccupations en matière de sécurité publique ou de risques de fuite sont négligeables, et que les moyens d’appel vont clairement au-delà des exigences du critère de « non-futilité », l’intérêt du public lié au caractère révisable des jugements peut très bien l’emporter sur l’intérêt lié à la force exécutoire de ceux-ci, même en cas de meurtre ou d’une autre infraction très grave.

[Je souligne]

[15] Je souligne aussi la variation sur le même thème que mon collègue le juge Vauclair formulait de la façon suivante dans M.L. c. R.[6] :

[18] Le public bien informé, même choqué par les comportements criminels en cause, sait que l’appel fait partie du processus pénal et lorsqu’il n’est pas futile, il est important et participe à un système de justice juste et légitime.

[19] J’estime que la confiance du public bien informé est plus robuste qu’on le croit parfois. Comme le rappelait le juge Wagner, siégeant alors à notre Cour, « la perte de confiance des citoyens dans l’administration de la justice n’est pas seulement tributaire d’une mise en liberté inopportune, mais peut très bien découler d’un refus injustifié de remettre un accusé en liberté en attendant le sort de son pourvoi. »

[Je souligne]

[16] En somme, pour tous ces motifs je suis d’avis que l’appelant satisfait les critères prévus au paragraphe 679(3) C.cr.

[17] Sa requête pour mise en liberté provisoire pendant l’appel sera donc accueillie.

[18] Toutefois, compte tenu de la nature des infractions dont l’appelant n’est plus présumé innocent, il convient de resserrer les conditions de sa mise en liberté par rapport à celles auxquelles il a été assujetti en première instance.

[19] J’ai pris par ailleurs note lors de l’audience que l’intimée n’insiste pas, avec raison, pour que je maintienne la condition suivant laquelle l’appelant ne devait pas quitter le Québec.

[20] Enfin, l’offre de l’appelant de déposer un cautionnement d’un montant non négligeable, soit 25 000 $, voire davantage, doublée de l’offre de garanties financières de son épouse, le couple étant très bien nanti selon l’admission de l’avocate de l’appelant, ne me convainc pas de lever en contrepartie la condition imposée à ce dernier en première instance de déposer son passeport au greffe. La confiance du public dans le système judiciaire est capitale et il ne doit certes pas avoir l’impression, surtout dans un cas comme celui en l’espèce, que l’argent permet d’obtenir des allègements.

[21] Si comme l’invoque l’avocate de l’appelant des obligations de nature financière, ou celles de réparer ou faire réparer sa maison en Floride, venaient à vraiment nécessiter sa présence dans cet état américain durant l’instance d’appel, ce qui n’était aucunement le cas lors de l’audience, il pourra présenter une demande à un juge de la Cour en alléguant des faits nouveaux, aux fins d’obtenir une modification aux conditions de sa mise en liberté établies ci-après.