R. c. Pronovost, 2017 QCCQ 10557

 

Les questions en litige sont donc, dans ces circonstances, les suivantes :

a) L’accusé, a-t-il conduit dangereusement son embarcation pour le public le 1er septembre 2013, eu égard à toutes les circonstances y compris la nature, l’état et l’usage des eaux et qui, au moment des événements, pouvait raisonnablement en être fait ?

b) L’accusé s’est-il comporté comme une personne raisonnablement prudente ou, au contraire, son comportement était tellement fautif qu’il s’écarte de façon marquée à ce qui aurait été attendu ?

 

LE DROIT

[18] Dans le Code criminel, le législateur énonce l’infraction de conduite dangereuse en ces termes :
Article 249

(1) Commet une infraction quiconque conduit, selon le cas :

[…]

b) un bateau ou des skis nautiques, une planche de surf, un aquaplane ou autre objet remorqué sur les eaux intérieures ou la mer territoriale du Canada ou au-dessus de ces eaux ou de cette mer d’une manière dangereuse pour le public, eu égard aux circonstances, y compris la nature et l’état de ces eaux ou de cette mer et l’usage qui, au moment considéré, en est ou pourrait raisonnablement en être fait;

[…]

(2) Quiconque commet une infraction mentionnée au paragraphe (1) est coupable :

a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans;

[19] Le 8 juin 2017, dans l’affaire Czornobaj, la Cour d’appel du Québec nous rappelle en citant la Cour suprême du Canada l’élément matériel de cette infraction :

Dans un arrêt unanime, la Cour suprême explique en ces termes l’élément matériel (actus reus) de l’infraction :

[34] Pour déterminer si l’actus reus a été établi, il faut déterminer si la façon de conduire était objectivement dangereuse pour le public dans les circonstances. L’enquête doit être axée sur les risques créés par la façon de conduire de l’accusé, et non sur les conséquences, comme un accident dans lequel il aurait été impliqué. Comme l’a déclaré la juge Charron au par. 46 de Beatty, « [l]e tribunal ne doit pas tirer de conclusion hâtive au sujet de la façon de conduire en se fondant sur la conséquence. Il doit procéder à un examen sérieux de la façon de conduire » […]. Une façon de conduire peut à juste titre être qualifiée de dangereuse lorsqu’elle met en danger le public. L’élément pertinent, c’est le risque de dommage ou de préjudice qu’engendre la façon de conduire, non les conséquences d’un accident ultérieur.

[Je souligne]

[23] Quant à l’élément moral (mens rea) de l’infraction, le plus haut tribunal du pays ajoute :

[36] L’analyse relative à la mens rea doit être centrée sur la question de savoir si la façon dangereuse de conduire résultait d’un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation (Beatty, par. 48). Il est utile d’aborder le sujet en posant deux questions. La première est de savoir si, compte tenu de tous les éléments de preuve pertinents, une personne raisonnable aurait prévu le risque et pris les mesures pour l’éviter si possible. Le cas échéant, la deuxième question est de savoir si l’omission de l’accusé de prévoir le risque et de prendre les mesures pour l’éviter si possible constitue un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé.

[…]

[40] De façon générale, l’existence de la mens rea objective requise peut s’inférer du fait que l’accusé a conduit d’une façon qui constituait un écart marqué par rapport à la norme. Toutefois, même si la façon de conduire constitue un écart marqué par rapport à une façon de conduire normale, le juge des faits doit examiner toutes les circonstances pour déterminer s’il convient de conclure, de la façon de conduire, à la présence d’un tel comportement de l’accusé. La preuve peut soulever un doute sur la question de savoir s’il convient, dans un cas en particulier, d’inférer de la façon de conduire un écart marqué par rapport à la norme de diligence. La prémisse sous-jacente permettant de conclure à une faute en raison d’une façon de conduire objectivement dangereuse constituant un écart marqué par rapport à la norme est qu’une personne raisonnable dans la même situation que l’accusé aurait été consciente du risque créé par la façon de conduire en cause, et elle ne se serait pas livrée à l’activité : Beatty, par. 37.
[Je souligne]

[…]

[34] La professeure Rachel Grondin, résume ainsi ces différents principes concernant l’impératif de tenir compte de l’état mental d’un accusé :

Le comportement sanctionné doit être blâmable; il exige une négligence pénale provenant de l’application d’un critère objectif modifié faisant ainsi appel à l’état mental de l’accusé. La faute de ce dernier « consiste en l’absence de l’état mental de diligence requis ». La poursuite doit faire la preuve hors de tout doute raisonnable que l’accusé n’a pas eu le comportement auquel on s’attend de la part d’une personne raisonnablement prudente dans les circonstances.

Même si aucune intention particulière spécifique n’est requise pour cette infraction, aucun crime n’est commis si la conduite dangereuse est le résultat d’une défectuosité ou d’une incapacité physique soudaine car aucun crime n’existe sans une faute. Une personne accusée de cette infraction peut « faire naître un doute raisonnable quant à savoir si une personne raisonnable aurait été consciente des risques inhérents à son comportement ».
[Je souligne]

[35] En bref, la question à se poser est la suivante : est-ce que la preuve relative à l’état d’esprit véritable de l’accusé permet de douter qu’une personne raisonnable, placée dans la même situation que l’accusé, aurait été consciente du risque créé par ce comportement? Si un tel doute est soulevé, un acquittement s’impose.» [1] (références omises)

[20] Il ne faut pas oublier qu’une accusation de conduite dangereuse est une infraction criminelle grave comme nous le rappellent les juges de la Cour suprême du Canada dans R. c. Roy :
« […] Il est donc très important de s’assurer que l’exigence de la faute en matière de […] de façon marquée de la simple négligence. »[2]

[21] Plus loin dans cet arrêt unanime de la Cour suprême du Canada, le juge Cromwell mentionne ce qui suit, relativement à la simple imprudence :

« La simple imprudence que même les conducteurs les plus prudents peuvent à l’occasion commettre n’est généralement pas criminelle. Tel qu’indiqué précédemment, la juge Charron a formulé ainsi cette idée au nom des juges majoritaires dans l’arrêt Beatty : « [s]’il faut considérer comme une infraction criminelle chaque écart par rapport à la norme civile, quelle qu’en soit la gravité, on risque de ratisser trop large et de qualifier de criminelles des personnes qui en réalité ne sont pas moralement blâmables » (par. 34). La Juge en chef a exprimé un point de vue semblable : « même les bons conducteurs ont à l’occasion des moments d’inattention qui peuvent, selon les circonstances, engager leur responsabilité civile ou donner lieu à une condamnation pour conduite imprudente. Mais en général, ces moments d’inattention ne vont pas jusqu’à l’écart marqué requis pour justifier une déclaration de culpabilité pour conduite dangereuse » (par. 71).

L’exigence minimale en matière de faute réside dans l’écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation — un critère objectif modifié. L’application de ce critère objectif modifié signifie que, bien que la personne raisonnable soit placée dans la situation de l’accusé, la preuve des qualités personnelles de l’accusé (telles que son âge, son expérience et son niveau d’instruction) n’est pas pertinente, sauf si elles visent son incapacité d’apprécier ou d’éviter le risque (par. 40). Certes, la preuve d’une mens rea subjective — c’est-à-dire, conduire délibérément de façon dangereuse — justifierait une déclaration de culpabilité pour conduite dangereuse, mais cette preuve n’est pas requise (la juge Charron, par. 47; voir aussi la juge en chef McLachlin, par. 74-75, et le juge Fish, par. 86).»[3]

[22] De ces citations, le Tribunal retient qu’un simple écart de conduite, qui peut vraisemblablement entrainer une responsabilité civile, n’est pas suffisant pour entrainer une condamnation à une accusation criminelle de conduite dangereuse. L’objectif de la législation applicable dans la présente affaire n’est pas de blâmer sévèrement tous les comportements qui ne respectent pas le seuil le plus élevé de prudence, mais bien de sanctionner un comportement fautif qui s’écarte de façon marquée à ce qui aurait été attendu.

[23] En terminant, il faut le rappeler tout comme la procureure de la défense l’a fait au Tribunal que la jurisprudence ne fait pas de distinction quant à un dossier impliquant la conduite d’un véhicule à moteur (automobile ou un autre dossier impliquant la conduite d’une embarcation nautique). Les éléments constitutifs restent les mêmes dans les deux cas.

 

[…]

 

ANALYSE

[25]        Dans ce dossier comme dans tous les dossiers de nature criminelle, ce n’est pas à l’accusé de démontrer son innocence, mais bien à la poursuite de démontrer hors de tout doute raisonnable la culpabilité de l’accusé.

[26]        À cet effet, la poursuite soutient que n’eût été de la conduite dangereuse de l’accusé, l’accident n’aurait jamais eu lieu.  Pour elle, la conduite dangereuse de l’accusé se démontre par la haute vitesse près de l’entrée de la Marina Brousseau alors que des bouées indiquent, qu’à cet endroit, les bateaux doivent circuler à cinq kilomètres à l’heure.  Cela lui fait dire que n’eut été de la vitesse du bateau conduit par monsieur Pronovost, il aurait été en mesure de voir les trois bateaux attachés l’un à côté de l’autre et de ralentir.  Elle soutient que la preuve en poursuite démontre que les trois bateaux amarrés étaient visibles, avaient leurs phares de position réglementaires et que les panneaux à l’entrée de la Marina Brousseau indiquaient aux plaisanciers de ralentir afin d’éviter un impact.

[27]        De la preuve entendue au procès, le Tribunal ne peut pas être aussi catégorique que la poursuite.  Prenons chacun des arguments avancés par la poursuite et analysons les points.

 

  1. a)La conduite dangereuse invoquée par la poursuite

[28]        Madame Joannie Mantas-Lachapelle est sans doute la témoin de la poursuite la plus crédible et la plus fiable relativement à la description de la conduite de l’accusé.  En effet, elle était dans l’embarcation de l’accusé lors de l’impact.  Elle est une témoin privilégiée des agissements et de la conduite de l’accusé sur le chemin du retour.  De son témoignage, il ressort ce qui suit :

i-            Ce n’était pas la brunante, il faisait noir à notre retour;[4]

ii-            Il faisait très sombre sur le fleuve, le conducteur, Julien Mathieu Pronovost, se fiait beaucoup à son GPS pour conduire… il ne voyait quasiment rien sur le fleuve;[5]

iii-           L’accusé avait mis la toile du bateau;

iv-           L’accusé arrêtait fréquemment pour regarder sur le GPS pour s’assurer de la sécurité du retour;[6]

v-            En général il roulait assez tranquillement.  Il regardait et quand il voyait que tout était beau, il clanchait pour … aller plus vite parce qu’on avait un bout à faire;[7]

vi-           Selon madame Joannie Mantas-Lachapelle, les bateaux stationnés empiétaient dans le chenal;

vii-         Elle ne peut pas témoigner à quelle vitesse le bateau de monsieur Pronovost naviguait à leur retour;[8]

viii-      Il n’y a personne dans le bateau qui a vu distinctement les lumières des   trois embarcations immobilisées;[9]

[29]        On peut bien parler de vitesse excessive, de haute vitesse, que l’accusé allait vite, qu’il conduisait dangereusement, mais cela reste des perceptions de témoins qui ont chacun des intérêts différents.  Ce n’est pas une preuve hors de tout doute raisonnable de la vitesse qu’allait réellement l’accusé au moment de l’impact.

[30]        Il appert du témoignage de madame Joannie Mantas-Lachapelle que la conduite de monsieur Pronovost lui apparaissait comme étant normale.  Elle mentionne plusieurs éléments qui démontrent qu’il apportait une attention à la sécurité du voyage lors du retour, notamment le fait qu’il se référait au GPS alors qu’il ne voyait quasiment rien sur le fleuve à cause de la noirceur.  Elle mentionne qu’il effectuait des arrêts fréquents pour regarder aux alentours et évaluer la situation afin de naviguer de façon sécuritaire.  Elle mentionne qu’à l’occasion, l’accusé allait vite, mais à d’autres moments, il circulait à une vitesse sécuritaire.

  1. b)La haute vitesse près de l’entrée de la Marina Brousseau, décrite par la poursuite

[31]        Sur ce sujet, monsieur Robert Dupel, expert en sécurité nautique et en scène de crime, est venu témoigner.  Son témoignage non contredit, apporte un éclairage sur les bouées à l’entrée de la Marina Brousseau.  De son témoignage, il faut retenir ce qui suit :

i-            Il n’y a aucune limite de vitesse réglementée sur cette partie du fleuve St-Laurent et ni dans les eaux de la marina;[10]

ii-            Les limites de vitesse inscrites sur les bouées privées de la marina ne sont que des recommandations;[11]

iii-           Il est impossible de savoir la vitesse réelle du bateau, car aucune donnée ne peut la corroborée;[12]

iv-           Un observateur situé dans un bateau immobile perçoit une vitesse accentuée d’un bateau se dirigeant dans sa direction;[13]

[32]        De ce témoignage relativement aux bouées, en particulier, le Tribunal comprend que les bouées à l’entrée de la Marina Brousseau sont des recommandations de vitesses n’ayant aucune force de loi.  De plus, il ressort clairement de son témoignage que personne ne peut dire par observation fixe, la vitesse réelle d’une embarcation.

  1. c)Les trois embarcations amarrées étaient visibles et avaient leurs phares de position réglementaires, plaide la poursuite.

[33]        À cet égard, la preuve de la poursuite est peu concluante.  Selon le témoignage de madame Marilyne Lalonde, témoin de la poursuite, elle mentionne que sur un ponton ou même sur des bateaux, elle trouve tellement qu’il n’y a pas suffisamment de lumières.  Selon son témoignage on peut en déduire qu’il y avait la lumière de navigation juste au-dessus de la toile du conducteur, mais qu’il n’avait pas les fameuses lumières décoratives, styles lumières de Noël, mentionnées par le témoignage de madame Valérie Mantas-Lachapelle.

[34]        Les trois embarcations attachées à l’épaule, telles que décrites par l’ensemble des témoins avaient sûrement des lumières, mais lesquelles ?  De quelle façon ces lumières indiquaient clairement la position des trois bateaux ?  La poursuite n’a malheureusement pas de réponse précise à ces questions.  On peut certes le mentionner dans une plaidoirie écrite, mais la preuve ne le soutient pas.

[35]        Toute cette affaire et les accusations, qui en découlent, ont comme prémisse un conducteur de bateau en état d’ébriété qui par ses gestes a occasionné un accident causant des lésions corporelles.  Cependant, la preuve ne démontre aucune lésion corporelle et la poursuite reconnait, dès le départ du procès, qu’elle ne peut se décharger de son fardeau quant à la faculté affaiblie.  D’ailleurs, à cet effet, l’agente Valérie Fortin de la Sûreté du Québec, témoin de la poursuite, mentionne dans son témoignage n’avoir constaté aucune odeur d’alcool provenant de l’haleine du défendeur au moment de sa rencontre.

[36]        Par conséquent, de la preuve entendue, il n’y a pas d’alcool enjeu, il n’y pas d’état d’ébriété quelconque, la vitesse bien qu’estimative de plusieurs témoins de la poursuite, n’est pas prouvée hors de tout doute raisonnable.  Et, quant à la façon de conduire le bateau à moteur par l’accusé, un témoin de la poursuite mentionne plusieurs éléments qui démontrent que l’accusé apportait une attention à la sécurité du voyage de retour.  Il se fiait et se référait régulièrement à son GPS et il faisait des observations tout autour pour évaluer la situation en général.  Madame Joannie Mantas-Lachapelle mentionne même que l’accusé naviguait assez lentement.

[37]        Très honnêtement de toute la preuve entendue et acceptée, ce que le Tribunal trouvait le plus troublant était la conduite de l’accusé sur les eaux sombres du fleuve St-Laurent, en fin de journée, avec la toile du bateau fermée, lui limitant au maximum sa vision.

[38]        Le Tribunal s’est longuement questionné sur cette façon de conduire.  De ces faits prouvés, cette conduite était-elle objectivement dangereuse pour le public ?

[39]        «Civilement parlant», le Tribunal trouve cette façon de conduire dangereuse et irresponsable.  Malgré cette remarque, il doit se demander dans un procès au criminel, si elle résulte d’un écart marqué par rapport à la norme de diligence que respecterait une personne raisonnable dans la même situation.  Cette personne raisonnable aurait-elle pu prévoir le risque et prendre des mesures pour l’éviter si possible?

[40]        Comme mentionné antérieurement, la défense a fait entendre l’expert en sécurité nautique et en scène de crime, monsieur Robert Dupel. Son témoignage n’est aucunement contredit et il a répondu à l’ensemble de mes inquiétudes et surtout de mon questionnement.

[41]        La toile de l’embarcation de l’accusé était conforme aux normes du constructeur.  Aucune preuve ne tend à en démontrer le contraire.  Naviguer avec la toile fermée n’est pas une pratique anormale selon l’expert.  De son expertise et de son témoignage, le tribunal retient ce qui suit :

I-            Si le soleil ou la lumière est derrière l’objet observé, un trouble de perception de la profondeur affectera l’observateur.  Il peut alors mal percevoir la distance réelle de l’objet;[14]

II-            L’emplacement et la direction des trois embarcations immobilisées près de la Marina Brousseau ne permettaient pas à l’accusé de voir leurs feux de côté (vert et rouge);[15]

III-           Les embarcations immobiles ancrées côte à côte présentaient, dans les circonstances, un éclairage non conforme et trompeur;[16]

IV-         Lors de la conduite d’un bateau, les lumières de la marina et de source terrestre à proximité peuvent constituer des points de repère pour manœuvrer en direction de la marina;[17]

V-           Si la toile d’un bateau est fermée et qu’il fait sombre, la conduite à l’aide d’un GPS, tel que l’a fait l’accusé dans ces circonstances est raisonnable et sécuritaire, car elle respecte le principe de veille visuelle;

VI-         Le regroupement de trois feux de position blancs, tel que décrit par les témoins ne permet pas de distinguer, pour quelqu’un qui s’en vient à leur rencontre, qu’il s’agit d’embarcation alors qu’ils sont si près de la marina;

VII-         L’impact d’une collision nautique qui est toujours plus importante que celle terrestre, car les premiers n’ont pas de système de freinage ou d’éléments de friction permettant de ralentir;[18]

VIII-        La forme des embarcations occasionne souvent lors d’une collision la projection d’un bateau en mouvement au-dessus d’un autre bateau stationnaire ou un arrêt dessus.[19]

IX-         Les bateaux sont conçus par le fabricant pour être conduits assis;[20]

[42]        Après avoir entendu toute la preuve, examiné tous les documents, les lieux et autres faits se rapportant à l’événement du 1erseptembre 2013, l’expert a établi trois hypothèses pour expliquer le déroulement des événements :

1)   Monsieur Pronovost a voulu se diriger vers la marina.  Il s’est fié aux lumières de la marina comme points de repère.  Dû au regroupement des lumières de navigation des trois embarcations immobiles, celles-ci ont été confondues avec l’éclairage de la marina et du rivage;[21]

2)   Monsieur Pronovost a vu à la dernière minute la lumière rouge du ponton.  Il a, par conséquent, immédiatement bifurqué à sa droite pour éviter la collision.  Cette hypothèse est moins probable vu l’angle de la lumière et du bateau, mais l’expert l’a quand même envisagée;[22]

3)   Monsieur Pronovost s’est rapproché des bouées privées pour atteindre un endroit éclairé pour se mettre en sécurité et pouvoir avoir une aide visuelle;[23]

[43]        Suite à son analyse, à son expérience et à ses compétences en ce domaine, l’expert en sécurité nautique et en scène de crime, monsieur Dupel, arrive à la conclusion suivante relativement à la cause de l’accident.  Il mentionne lors de son témoignage ce qui suit :

« Bien, la cause, dans ce cas-ci, est évidente, c’est qu’il y a trois bateaux de stationner à la noirceur dans une voie circulable près d’une marina ».[24]

[44]        «Criminellement parlant», l’accusé ne pouvait pas prévoir qu’à cette heure, sur les eaux sombres du fleuve Saint-Laurent, près de la Marina Brousseau, trois embarcations seraient côte à côte, en tout ou en partie sur la voie circulable. Cependant, avec son GPS, il devait ou aurait dû savoir qu’il s’approchait d’une marina, demandant alors une attention particulière. Cette conduite avec la toile fermée, sans distinction du lieu où il se trouve, est sans doute une conduite imprudente de sa part, mais ce n’est assurément pas une conduite dangereuse, telle qu’elle a été définie par le législateur.

[45]        C’est pourquoi, le Tribunal conclut que la poursuite ne s’est pas déchargée de son fardeau de preuve et acquitte l’accusé sur le dernier chef d’accusation qu’il restait.