L’admission de la preuve d’expert modifié par la Cour suprême du Canada.

White Burgess Langille Inman v. Abbott and Haliburton Co., 2015 SCC 23 :

[23] Dans un premier temps, celui qui veut présenter le témoignage doit démontrer qu’il satisfait aux critères d’admissibilité, soit les quatre critères énoncés dans l’arrêt Mohan, à savoir la pertinence, la nécessité, l’absence de toute règle d’exclusion et la qualification suffisante de l’expert. De plus, dans le cas d’une opinion fondée sur une science nouvelle ou contestée ou sur une science utilisée à des fins nouvelles, la fiabilité des principes scientifiques étayant la preuve doit être démontrée (J.‑L.J., par. 33, 35‑36 et 47; Trochym, par. 27; Lederman, Bryant et Fuerst, p. 788‑789 et 800‑801). Le critère de la pertinence, à ce stade, s’entend de la pertinence logique (Abbey (ONCA), par. 82; J.‑L.J., par. 47). Tout témoignage qui ne satisfait pas à ces critères devrait être exclu. Il est à noter qu’à mon avis, la nécessité demeure un critère (D.D., par. 57; voir D. M. Paciocco et L. Stuesser, The Law of Evidence (7e éd. 2015), p. 209‑210; R. c. Boswell, 2011 ONCA 283, 85 C.R. (6th) 290, par. 13; R. c. C.(M.), 2014 ONCA 611, 13 C.R. (7th) 396, par. 72).

[24] Dans un deuxième temps, le juge‑gardien exerce son pouvoir discrétionnaire en soupesant les risques et les bénéfices éventuels que présente l’admission du témoignage, afin de décider si les premiers sont justifiés par les seconds. Cet exercice nécessaire de pondération a été décrit de plusieurs façons. Dans l’arrêt Mohan, le juge Sopinka parle du « facteur fiabilité‑effet » (p. 21), tandis que, dans l’arrêt J.‑L.J., le juge Binnie renvoie à « la pertinence, la fiabilité et la nécessité par rapport au délai, au préjudice, à la confusion qui peuvent résulter » (par. 47). Le juge Doherty résume bien la question dans l’arrêt Abbey, lorsqu’il explique que [traduction] « le juge du procès doit décider si le témoignage d’expert qui satisfait aux conditions préalables à l’admissibilité est assez avantageux pour le procès pour justifier son admission malgré le préjudice potentiel, pour le procès, qui peut découler de son admission » (par. 76).

[…]

[53] À mon avis, c’est sous le volet « qualification suffisante de l’expert » du cadre établi par l’arrêt Mohan qu’il convient d’abord d’examiner les préoccupations concernant l’obligation de l’expert envers le tribunal et s’il peut ou veut s’en acquitter (S. C. Hill, D. M. Tanovich et L. P. Strezos, McWilliams’ Canadian Criminal Evidence (5e éd. (feuilles mobiles)), vol. 2, § 12:30.20.50; voir également Deemar c. College of Veterinarians of Ontario, 2008 ONCA 600, 92 O.R. (3d) 97, par. 21; Lederman, Bryant et Fuerst, p. 826‑827; Halsbury’s Laws of Canada: Evidence, par. HEV‑152 « Partiality », The Canadian Encyclopedic Digest (Ont. 4e éd. (feuilles mobiles)), vol. 24, titre 62‑ Evidence, § 469). Le témoin expert proposé qui ne peut ou ne veut s’acquitter de cette obligation envers le tribunal ne possède pas la qualification suffisante pour exercer ce rôle. En abordant cette préoccupation sous le volet de la « qualification suffisante de l’expert », les tribunaux pourront s’attacher à évaluer les risques importants que présentent les experts qui ont un parti pris (Hill, Tanovich et Strezos, §12:30.20.50; Paciocco, « Jukebox », p. 595).