L’article 7(7) C.cr. qui constitue une exception au principe de la territorialité des lois établi à l’article 6(2) C.cr. doit être interprété restrictivement.
[24] Il faut revenir ici au texte de l’article 7(7) C.cr. qui constitue, je le rappelle, une exception au principe de la territorialité des lois établi à l’article 6(2) C.cr.[20] et qui doit, en conséquence, être interprété restrictivement. Le texte de l’article 7(7) C.cr. ne saurait être plus clair. Si le procureur général du Canada ne donne pas son consentement au plus tard huit jours après que la poursuite a été engagée, il est mis fin à celle-ci. La version anglaise est toute aussi limpide : « no proceedings […] shall be continued […] ».
[25] L’appelante concède que les premières accusations portées contre l’intimé sont devenues nulles après l’expiration du délai de huit jours et le défaut du procureur général d’avoir donné son consentement à l’intérieur de ce délai. Tel que mentionné, il soutient néanmoins qu’il pouvait porter de nouvelles accusations en vertu de son pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites.
[26] Bien que large, ce pouvoir n’est pas illimité. Par exemple, il va de soi que l’expiration du délai de prescription d’une infraction qui ne peut être poursuivie que par procédure sommaire ne permettrait pas le dépôt d’une poursuite[21]. C’est un peu la même chose en l’espèce.
[27] Le texte clair de l’article 7(7) C.cr. fait obstacle à la prétention de l’appelante.
[28] Il serait de plus illogique que le législateur impose un délai si court si celui-ci pouvait être renouvelé au choix du ministère public. Il vaut la peine à cet égard d’insister sur la raison d’être de ce délai qui est d’éviter un incident diplomatique avec un autre pays en permettant au procureur général du Canada de faire les vérifications qui s’imposent lorsqu’un non canadien est accusé[22] :
[34] Third, it is clear that the eight day time limit in s. 7(7) to obtain the consent of the Attorney General of Canada to continue the proceedings was designed by Parliament to ensure that charges for extraterritorial offences against people who are not Canadian citizens are screened at an early stage by the Attorney General of Canada in order to minimize the risk that international relations issues will arise from such prosecutions. If no-one adverts to the issue of obtaining the consent of the Attorney General of Canada under s. 7(7), and the prosecution continues, this increases the risk that such a prosecution may have an adverse effect on international relations. I hasten to add that there is no evidence in the record in this case to suggest that any adverse effects on international relations occurred in this case. But s. 7(7) exists to ensure that the Attorney General of Canada is able to consider potential international implications of the prosecution of a non-citizen for an offence committed outside Canada. If no-one alerts to Attorney General of Canada to the existence of the prosecution, she is denied the ability to consider any possible international issues.
[29] Enfin, si on garde à l’esprit le caractère international du présent dossier, on conviendra que, mis à part l’atterrissage à Montréal de l’avion à bord duquel des attouchements sexuels auraient été commis, tous les facteurs de rattachement pointent vers l’application du droit pénal français. Tenant donc pour acquis que c’est désormais le droit étranger qui a pris le relais et qui s’applique[23], l’appelante ne peut pas alléguer son pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites pour récupérer unilatéralement la juridiction que les tribunaux canadiens ont perdue, et ce, en déposant de nouvelles accusations.
La conclusion
[30] Comme j’en viens à la conclusion que le délai de huit jours de l’article 7(7) C.cr. est de rigueur et ne laisse aucun choix à l’appelante, il m’apparaît plus juste, à l’instar de la Ontario Court of Justice dans R. v. Patel, de déclarer que les accusations portées dans le présent dossier sont nulles, et ce, plutôt que de confirmer la conclusion du juge ordonnant l’arrêt des procédures[24]. J’accueillerais donc l’appel à cette seule fin.