R. c. Demers, 2020 QCCQ 3059

L’accusé a plaidé coupable à une accusation de conduite avec les capacités affaiblies survenue le 6 août 2018. La particularité du dossier est qu’il en est à sa septième condamnation pour conduite avec les facultés affaiblies.

[25]        Quelle peine s’applique?

[26]        La poursuite présente un tableau de peines applicables et de la jurisprudence qui appuie sa position[1].

[27]        Il est inutile de répéter à quel point les tribunaux sont accaparés par cette criminalité, à quel point ce genre de crime est répandu et à quel point les conséquences de cette criminalité sont importantes au Canada[2].

[28]        Le 6 août 2018, l’accusé a un comportement extrêmement dangereux. S’il avait heurté la motocyclette, on peut facilement imaginer l’ampleur du drame. Il n’est pas question de lui imposer une peine pour un crime qu’il n’a pas commis, mais il faut mesurer l’ampleur du danger représenté par l’accusé. Par contraste, je réfère à l’affaire Gauthier[3], où l’accusé circule en mobylette.

[29]        La poursuite rappelle que le crime commis est passible de 5 ans d’emprisonnement. Si la peine minimale est imposée, de 4 mois, quel délinquant est susceptible de recevoir une peine de 5 ans, toujours dans des circonstances semblables, sans accident, sans blessé, ni mort? À qui le législateur pensait-il quand il a décrété cette peine?

[30]        Je n’imposerai pas la peine maximale. Elle n’est pas requise par le Ministère public et je ne crois pas qu’elle soit appropriée non plus. Il n’en demeure pas moins que le législateur, par sa rédaction de ces dispositions et l’éventail de peines qu’il précise, signale le degré de sérieux qu’il attribue au crime.

[31]        À titre de facteur atténuant, je note le plaidoyer de culpabilité de l’accusé et le fait qu’il indique avoir cessé toute consommation d’alcool. Son implication auprès de sa famille apparaît aussi sincère et précieuse. Il semble aussi qu’il ait acquis, du moins dans les dernières années, la valeur du travail.

[32]        Par contre, à titre de facteur aggravant, je note les 6 antécédents en semblable matière auxquelles s’ajoute la condamnation pour conduite pendant l’interdiction. Il faut aussi considérer les multiples autres antécédents judiciaires dans des matières diverses, lesquels démontrent à mon avis un schème de valeurs délinquantes. Malgré son âge qui avance, l’accusé ne se tient pas longtemps éloigné des tribunaux.

[33]        Réjean Demers donne à propos de ses diverses condamnations des explications bien difficiles à accepter. Pour sa production de cannabis, il indique que sa conjointe n’aurait fait pousser qu’un seul plant, puis 2 ou 3. Il reçoit pourtant une peine de 2 ans moins 1 jour à être purgée dans la collectivité… Quant à l’accusation de grossière indécence, il aurait été accosté par un individu qui lui aurait fait des avances, si je comprends bien ce qu’il rapporte.

[34]        Pour le crime à propos duquel je dois prononcer la peine, il n’a bu de l’alcool qu’une seule fois depuis 2003 et il faut qu’il s’agisse de la fois où il est arrêté au volant de son véhicule. La querelle avec sa conjointe tournait autour de la consommation d’alcool de cette dernière. Cela le pousse lui-même à consommer puis à prendre le volant. J’ai des difficultés avec cette explication.

[35]        Le taux d’alcool dans son sang, à 156 mg d’alcool, est presque le double de la limite permise, ce qui est significatif. L’accusé reconnaît avoir été si intoxiqué qu’il ne garde que peu de souvenirs de la soirée.

[36]        Sa conduite du véhicule était aussi clairement dangereuse, ce qui est pertinent, par opposition par exemple à la personne arrêtée dans un barrage routier et pour laquelle on ne constate pas de signes importants d’affaiblissement de la capacité de conduire.

[37]        En défense, aucune autorité n’est soumise et je doute qu’il en existe qui condamne un récidiviste à la peine minimale de 4 mois pour sa septième condamnation. Je signale enfin que l’accusé a déjà eu une peine de 6 mois pour le même crime.

[38]        J’indique enfin que l’accusé n’a recherché aucune aide après sa dernière arrestation pour cesser de façon permanente de consommer de l’alcool, comme il l’avait fait en 2003 en fréquentant le mouvement des Alcooliques anonymes pour quelques années. Il dit avoir cessé par lui-même. Je signale que le 6 août 2018, il a aussi recommencé par lui-même.

[39]        La période d’emprisonnement devra être significative. Une probation suivra avec un suivi pour l’alcoolisme de l’accusé.

EN CONSÉQUENCE ET POUR CES MOTIFS, l’accusé est condamné à 18 MOIS D’EMPRISONNEMENT suivi d’une PROBATION DE 3 ANS aux conditions présentes au dossier.