Casavant c. R., 2025 QCCA 20

Les tribunaux doivent réagir de manière proportionnelle.

[58] D’emblée, il faut rejeter la première erreur sur laquelle insiste l’appelant, qui est sans fondement. L’intimé a raison sur cette question. Il ne fait aucun doute que l’arrêt Friesen énonce des principes applicables tant pour les violences sexuelles à l’égard des enfants que des adultes : R. c. Friesen, 2020 CSC 9 (CanLII), [2020] 1 R.C.S. 424, par. 117; voir aussi R. c. S.J., 2024 QCCA 253, par. 225.

[59] Par ailleurs, il faut souligner que l’intimé fait une lecture indûment étroite des principes de la détermination de la peine en amalgamant sans nuances les messages de la Cour suprême dans les arrêts R. c. Goldfinch, 2019 CSC 38 (CanLII), [2019] 3 R.C.S. 3, R. c. Friesen, 2020 CSC 9 (CanLII), [2020] 1 R.C.S. 424 et R. c. Parranto, 2021 CSC 46 (CanLII), [2021] 3 R.C.S. 366. Or, les nuances sont au cœur de la détermination de la peine. En proposant une peine essentiellement orientée par la dissuasion et la dénonciation, il escamote de nombreux principes qui doivent tout autant guider les juges dans l’exercice de la détermination de la peine.

[60] La Cour suprême a certes rappelé que certaines décisions canadiennes ont malheureusement banalisé l’agression sexuelle en la réduisant, par exemple, à un événement anodin en raison de gestes qualifiés de « moins invasifs ». Elle a rappelé qu’il n’en est rien et que l’agression sexuelle est intrinsèquement un crime grave en raison de sa nature et des conséquences généralement négatives dans la vie des victimes. Elle a pressé les tribunaux de réagir de manière plus appropriée et de ne plus prononcer de peines déconnectées de la réalité, tant du crime lui-même que de ce que la société en comprend aujourd’hui, et de ne pas le décrire comme un geste inoffensif aux conséquences négatives douteuses.

[61] Du même souffle, elle réaffirme que les tribunaux doivent réagir de manière proportionnelle.

[64] Il faut réitérer le message voulant que l’agression sexuelle constitue un crime grave qui en soi comporte des conséquences graves. Il s’agit de la définition même du comportement prohibé. Il n’est toutefois pas impossible d’envisager une peine autre que l’emprisonnement dans un cas donné, si cette peine demeure proportionnelle aux circonstances et au délinquant. À tort ou à raison, ces cas seront peut-être rares, mais notre Cour a souvent répété que la sévérité d’une peine n’est pas l’apanage de l’emprisonnement : voir notamment R. c. Nadeau, 2020 QCCA 445, par. 55; R. c. Bernard, 2019 QCCA 638, par. 28; R. c. Charbonneau, 2016 QCCA 1567, par. 18; R. c. Houle, 2023 QCCA 99, par. 46.

[66] Cela est sage puisque, si l’infraction demeure toujours grave, comme l’explique bien l’arrêt R. c. Lemieux, 2023 QCCA 480, personne ne nie que le crime d’agression sexuelle se décline dans des circonstances diverses et qu’il est commis par des délinquants aux profils très variés.