Par Me Félix-Antoine T. Doyon

Voici un résumé que nous avons préparé eu égard aux règles applicables à la preuve des faits similaires :

 

Principe :                 Bien que pouvant être pertinente,  la preuve de mauvaise réputation (ou de propension) est inadmissible.

Fondement :            Cette règle vise à assurer que le prévenu sera jugé pour l’infraction dont il est accusé et non pas en fonction de sa moralité ou de ses crimes passés.

 

Exception :                 La preuve des faits similaires constitue une des exceptions à cette règle et ne sera admise que si sa valeur probante, qui repose sur l’improbabilité d’une coïncidence (critère de l’improbabilité que les faits similaires soient le fruit d’une coïncidence), l’emporte sur son effet préjudiciable.

Conclusion :               En conséquence, la preuve de faits similaires sera recevable « si, et seulement si, elle tend à établir davantage qu’une propension générale (préjudice moral) 

                                                                              ET

si elle est  plus probante que préjudiciable relativement à une question soulevée par le crime reproché » (R. c. Handy, [2002] 2 R.C.S. 908).

 

Procédure :                Il appartient au ministère public de préciser la fin recherchée par cette preuve de manière à pouvoir en évaluer l’effet préjudiciable, généralement dans le cadre d’un voir-dire.

 

Les fins recherchées :   La preuve des faits similaires peut viser à :

§  Contrer une preuve de bonne réputation introduite par l’accusé;

§  Contrer une défense d’accident;

§  Imputer à l’accusé un aspect de la connaissance coupable nécessaire à la culpabilité;

§  Établir l’identité de l’auteur de l’infraction[1];

§  Démontrer un comportement répétitif ou systématique;

§  Rendre plus clair l’exposé des évènements;

§  Déterminer la crédibilité de l’accusé;

§  Rehausser la crédibilité d’un témoin lorsque sa version des faits contredit celle de l’accusé[2].

Source de valeur probante :                La principale source de valeur probante est la similitude de comportement mais, selon les fins qu’elle poursuit, les sources de force probante quant aux inférences varieront (voir R. c. Handy, [2002] 2 R.C.S. 908 aux para 76-78). L’évaluation de similitudes se fait aux cas par cas. Toute fois la Cour suprême dans Handy a énuméré un certain nombre de critères pertinents, soit :

(1)    La proximité temporelle des actes similaires[3];

(2)    La mesure dans laquelle les autres actes ressemblent dans leurs moindres détails à la conduite reprochée;

(3)    La fréquence des actes similaires;

(4)    Les circonstances entourant les faits similaires ou s’y rapportant;

(5)    Tout trait distinctif commun aux épisodes;

(6)    Les faits subséquents et;

(7)    Tout autre facteur susceptible d’étayer ou de réfuter l’unité sous-jacente des actes similaires[4].

 

Attention !!! :        Des similitudes trop génériques comportent le risque important que la preuve de faits similaires soit mal utilisée[5].

                            De plus, même si une telle preuve est concluante, elle est susceptible d’être exclue pour des raisons de préjudice global si elle porte sur une question secondaire[6].

                       Le fait similaire peut être antérieur soit postérieur aux évènements faisant l’objet du litige, mais il doit présenter une certaine similitude avec ceux-ci de sorte qu’il soit possible de faire les rapprochements nécessaires[7].


[1] Lorsque l’on vise à prouver l’identité de l’auteur du crime, il doit exister un haut degré de similarité (R. c. Nicholas, (2004), 182 C.C.C. (3d) 393 au para. 65 (CAO). Ce sera le cas lorsqu’on peut constater une marque ou une signature particulière (R. c. Arp, [1998] 3 R.C.S. 339 aux para. 44, 45, 48, 50; R. c. Handy, [2002] 2 R.C.S. 908 aux para. 77,79).

[2] Eu égard à la question de la crédibilité, la Cour suprême a cependant indiqué qu’il faut être prudent pour ne pas trop ouvrir la porte à l’admissibilité d’une preuve de propension, puisque la crédibilité est une question omniprésente dans la plupart des procès et que « [t]out ce qui ternit la moralité de l’accusé peut accessoirement accroître la crédibilité du plaignant (R. c. Handy, [2002] 2 R.C.S. 908 aux para. 115-116).

[3] Dans R. c. Jesse (2010), 252 C.C.C. (3d) 442 (CA CB), conf. à 2012 CSC 21 (sans traiter de cette question), a conclu que le juge peut valablement soustraire toute période d’incarcération qui a neutralisé l’accusé (par. 72).

[4] R. c. Perrier, [2004] 3 R.C.S. 228 aupara. 22.

[5] R. c. Trochym, [2007] 1 R.C.S. 239 au para. 74-75, 186-187.

[6] R. c. Handy, [2002] 2 R.C.S. 908 aupara. 74.

[7] R. c. B. (C.R.), [1990] 1 R.C.S. 717.